Le blog du Temps de l'Immaculée.
21/12/2024
21/12/2024
Divin Soleil, ô Jésus ! Vous venez nous arracher à la nuit éternelle : soyez à jamais béni ! Mais combien vous exercez notre foi, avant de luire à nos yeux dans toute votre splendeur ! Combien vous aimez à voiler vos rayons, jusqu’à l’instant marqué par votre Père céleste, où vous devez épanouir tous vos feux ! Voici que vous traversez la Judée ; vous approchez de Jérusalem ; le voyage de Marie et de Joseph tire à son terme. Sur le chemin, vous rencontrez une multitude d’hommes qui marchent en toutes les directions, et qui se rendent chacun dans sa ville d’origine, pour satisfaire à l’Édit du dénombrement. De tous ces hommes, aucun ne vous a soupçonné si près de lui, ô divin Orient ! Marie, votre Mère, est estimée par eux une femme vulgaire ; tout au plus, s’ils remarquent la majesté et l’incomparable modestie de cette auguste Reine, sentiront-ils vaguement le contraste frappant entre une si souveraine dignité et une condition si humble ; encore ont-ils bientôt oublié cette heureuse rencontre. S’ils voient avec tant d’indifférence la mère, le fils non encore enfanté à la lumière visible, lui donneront-ils une pensée ? Et cependant ce fils, c’est vous-même, ô Soleil de justice ! Augmentez en nous la Foi, mais accroissez aussi l’amour. Si ces hommes vous aimaient, ô libérateur du genre humain, vous vous feriez sentir à eux ; leurs yeux ne vous verraient pas encore, mais du moins leur cœur serait ardent dans leur poitrine, ils vous désireraient, et ils hâteraient votre arrivée par leurs vœux et leurs soupirs. O Jésus qui traversez ainsi ce monde que vous avez fait, et qui ne forcez point l’hommage de vos créatures, nous voulons vous accompagner dans le resté de votre voyage ; nous baisons sur la terre les traces bénies des pas de celle qui vous porte en son sein ; nous ne voulons point vous quitter jusqu’à ce que nous soyons arrivés avec vous à l’heureuse Bethléhem, à cette Maison du Pain, où enfin nos yeux vous verront, ô Splendeur éternelle, notre Seigneur et notre Dieu !
20/12/2024
20/12/2024
O Fils de David, héritier de son trône et de sa puissance, vous parcourez, dans votre marche triomphale, une terre soumise autrefois à votre aïeul, aujourd’hui asservie par les Gentils. Vous reconnaissez de toutes parts, sur la route, tant de lieux témoins des merveilles de la justice et de la miséricorde de Jéhovah votre Père envers son peuple, au temps de cette ancienne Alliance qui tire à sa fin. Bientôt, le nuage virginal qui vous couvre étant ôté, vous entreprendrez de nouveaux voyages sur cette même terre ; vous y passerez en faisant le bien, et guérissant toute langueur et toute infirmité, et cependant n’ayant pas où reposer votre tête. Du moins, aujourd’hui, le sein maternel vous offre encore un asile doux et tranquille, où vous ne recevez que les témoignages de l’amour le plus tendre et le plus respectueux. Mais, ô Seigneur ! il vous faut sortir de cette heureuse retraite ; il vous faut, Lumière éternelle, luire au milieu des ténèbres ; car le captif que vous êtes venu délivrer languit dans sa prison. Il s’est assis dans l’ombre de la mort, et il y va périr, si vous ne venez promptement en ouvrir les portes avec votre Clef toute-puissante ! Ce captif, ô Jésus, c’est le genre humain, esclave de ses erreurs et de ses vices : venez briser le joug qui l’accable et le dégrade ; ce captif, c’est notre cœur trop souvent asservi à des penchants qu’il désavoue : venez, ô divin Libérateur, affranchir tout ce que vous avez daigné faire libre par votre grâce, et relever en nous la dignité de vos frères.
19/12/2024
Te souviens-tu de ce rude pèlerinage en solitaire à Chartres (1) :
« Dans tes intentions de prière revenait sans cesse le sort de ce “dissident” russe chrétien dont tu avais lu récemment les conditions atroces de détention au goulag. À travers lui, tu pensais à tous les martyrs du monstrueux communisme. Que valait ta peine et tes douleurs du moment par rapport à leurs souffrances indéfinies ? C’est pour lui et pour eux notamment que tu offrais à Dieu ce petit sacrifice d’une nuit. »
Ce dissident s’appelait Alexandre Ogorodnikov. Il fut enfermé dans les camps de concentration de l’archipel du goulag pendant neuf ans, jusqu’en février 1987. Il fut libéré grâce à une intervention de Ronald Reagan et de Margaret Thatcher auprès de Gorbatchev. De mémoire, c’est juste l’année précédente que tu avais fait ce raid. Peut-être ton sacrifice avait-il été une goutte d’eau dans un océan souterrain de prières permettant sa libération ? Mais dans ce mystère possible de la communion des saints, il y a peut-être aussi davantage encore.
Bien des années après, tu découvrais avec émotion la figure peu commune de celui pour qui tu avais marché. C’était dans le livre de Rod Dreher : Résister au mensonge, vivre en chrétiens dissidents (Artège, 2021). Explication. Autrefois leader respecté des jeunesses soviétiques, désabusé par le communisme, Alexandre Ogorodnikov se convertit à l’orthodoxie chrétienne et fonde un séminaire chrétien clandestin : « Ces séminaires étaient comme un feu de joie où venaient se réchauffer les cœurs orthodoxes gelés. » il ne tardera pas à être emprisonné jusque dans le camp de la mort “Perm 36”. Il raconte à Dreher qui l’a rencontré à Moscou :
« Quand on m’a mis dans ma cellule, j’ai salué les autres en leur disant : “La paix soit avec vous !” L’un d’eux m’a demandé si j’étais chrétien, à quoi j’ai répondu oui. Il m’a demandé de le prouver. Un autre détenu à renchéri : “Nous sommes la lie de l’humanité. Nous n’avons pas de cigarettes. Si Dieu nous en donne, nous voudrons bien croire en lui.” »
Ogorodnokov répond que le corps est le temple de l’Esprit et que fumer fait du tort, mais que Dieu les aimait tellement que, d’après lui, Il serait prêt à leur accorder des cigarettes en signe de sa miséricorde. Et il leur demande de se lever pour prier ensemble. Ses codétenus ont ri d’abord, mais ils se sont tus respectueusement lorsqu’il a entamé sa prière.
« Nous étions très nombreux dans cette cellule, mais le silence est alors tombé. Nous avons prié pendant quinze minutes, puis je leur ai dit que la prière était terminée et qu’ils pouvaient se rasseoir. À ce moment précis, les gardes ont ouvert la porte de la cellule et y ont jeté un paquet de cigarettes (…). C’était le signe pour lequel j’avais prié. Les prisonniers se sont mis à crier : “ Dieu existe ! Il existe !” Et c’est à ce moment-là que j’ai compris que Dieu s’adressait à moi aussi. Il me disait qu’il avait une mission pour moi dans cette prison. »
De fait, bien qu’elles ne l’aient pas condamné à mort mais ô combien brisé, frappé et torturé (il en a gardé une paralysie partielle du visage), les autorités pénitentiaires décident de lui donner une leçon en le plaçant dans le couloir de la mort :
« Quand je suis entré dans la cellule, j’ai regardé ceux qui étaient là et leur ai dit : “Écoutez-moi, mes frères, j’ai été envoyé ici pour vous aider à aller à la rencontre de la mort, non comme des criminels, mais comme des hommes dotés d’une âme qui s’en vont rencontrer leur créateur, Dieu le Père.” Comme les exécutions par fusillade avaient lieu tôt le matin, nombre de prisonniers ne trouvaient pas le sommeil. Ils attendaient qu’on frappe à la porte pour voir qui serait appelé. Impossible de fermer l’œil, évidemment. Je ne dormais pas non plus. Je tâchais de les aider à transformer cette nuit de terreur en nuit d’espérance. »
Face à ces criminels endurcis, le jeune Alexandre (qui n’a pas trente ans) leur dit que, bien qu’il ne soit pas prêtre, il est disposé à entendre leur confession. Il ne pourra les absoudre, mais quand il mourra lui-même et se retrouvera devant le Seigneur, il pourra témoigner de leur repentir : « Je leur disais que Dieu est miséricordieux, et que le seul fait de reconnaître leurs fautes et de renoncer au péché les laverait et les purifierait. Ils finiraient tous par être fusillés tôt ou tard ; au moins mourraient-ils la conscience tranquille. »
Mais comme le confinement avec les condamnés à mort n’a donc toujours pas conduit Ogorodnikov au repentir de son opposition à l’athéisme de l’État soviétique, le système carcéral le met alors à l’isolement :
« Une nuit que j’étais seul dans la petite pièce, j’ai très clairement senti quelqu’un me réveiller, doucement mais fermement. Quand j’ai ouvert les yeux, j’ai reçu une vision d’une grande clarté. Je pouvais voir le couloir de la prison. Je pouvais voir un homme à qui l’on retirait ses chaînes, et bien que je ne l’aie vu que de derrière, je savais exactement de qui il s’agissait. Je compris que Dieu avait envoyé un ange pour me réveiller afin que je puisse accompagner cet homme par la prière alors qu’on l’emmenait au peloton d’exécution. “Qui suis-je pour que tu me montres cela ?” ai-je demandé à Dieu. Puis je sus que je voyais toute l’étendue de l’amour de Dieu. Que nos prières et les miennes et celles de ce prisonnier, avaient été entendues, et qu’il était pardonné. J’étais en larmes. Je me suis réveillé plusieurs fois de la sorte, pas pour tous les prisonniers, mais pour un certain nombre d’entre eux. »
C’est dans une autre prison, où il est aussi seul, qu’Alexandre comprendra pourquoi le visage des condamnés ne lui était jamais montré. Une nuit le vieux garde entre dans sa cellule, l’air visiblement agité, délirant : « Ils viennent la nuit », lui dit-il. Ogorodnikov l’encourage à se confier. Et voici ce que lui révèle son geôlier :
« Quand j’étais plus jeune et que je travaillais dans une autre prison, nous avons sorti une vingtaine ou une trentaine de prêtres de leur cellule et nous les avons rassemblés à l’extérieur. Nous les avons attelés à un traîneau, et ils ont dû le tirer jusque dans la forêt. Toute la journée ils ont couru, jusqu’à atteindre des marais. Là, ils ont été placés en deux rangées, l’une derrière l’autre. Nous formions un périmètre autour des prisonniers. J’étais l’un des gardes. Un des membres du KGB s’est approché du premier prêtre et lui a demandé très calmement d’une voix douce : “Y a-t-il un Dieu ?” Le prêtre a dit oui. Il lui a tiré une balle dans le front de sorte que sa cervelle éclabousse le prêtre qui se tenait juste derrière. Il a patiemment chargé son pistolet, s’est placé devant le prêtre suivant et a demandé : “Dieu existe-t-il ?”– “Oui il existe.” Et l’homme l’a abattu de la même manière que le premier. Nous ne leur avons pas bandé les yeux. Ils ont vu exactement ce qui allait leur arriver. »
Devant Rod Dreher, Alexandre Ogorodnokov (alors septuagénaire) a du mal à refouler ses larmes en racontant cet ancien témoignage. D’une voix brisée par l’émotion, il conclut en martelant : « Aucun de ces prêtres n’a renié le Christ ! » Les nuits du vieux gardien étaient hantées par le souvenir de ces visages de prêtres. Voici pourquoi, selon Alexandre, ses visions mystiques ne lui montraient pas la face des condamnés : l’horreur l’aurait fait sombrer dans l’obsession lui aussi ! Sa mission, son ministère consistaient, avec la grâce de Dieu, à accompagner spirituellement dans leur dos de pauvres âmes au paradis comme un discret ange gardien, une bouée de sauvetage.
Splendeur de la communion des saints : ce « marché » fraternel et solidaire d’échange spirituel gratuit, fondé sur la réversibilité des mérites! Bouleversant la communauté humaine du péché originel. Nous sommes tous redevables quelque part de l’acte de charité, jamais perdu ni perdant, d’un prochain ou lointain, inconnu ou connu, vivant ou défunt, dans l’ « économie » collective du salut. « On ne se sauve pas tout seul. Nul ne retourne seul à la maison du Père. L’un donne la main à l’autre. Le pécheur tient la main du saint et le saint tient la main de Jésus » (Péguy). C’est aussi ce qu’on appelle le « nexus mysteriorum », ce lien intime des mystères qui signifie que les mystères sont connectés entre eux comme les baptisés dans le Corps mystique du Christ, comme l’Eglise militante (sur terre) l’est à l’Église souffrante (au Purgatoire) et triomphante (au Ciel) dans une circulation de sève surnaturelle.
Après sa libération, Ogorodnokov a continué de lutter pour la liberté religieuse en Union soviétique (qui est devenue un fait en 1990). Il a fondé le premier parti démocrate chrétien, la première école libre, la première soupe populaire pour les pauvres et le premier refuge privé pour orphelins et mères adolescentes. Mais le prix à payer de cet apostolat en URSS fut aussi l’assassinat d’un certain nombre de ses associés, y compris son frère et son secrétaire. Lui-même a survécu à une tentative d’assassinat. Un film-documentaire et un livre ont été réalisés sur sa vie (Dissident pour la vie par Kœnraad De Wolf). Quand Rod Dreher l’a rencontré à Moscou il y a quelques années, il continuait d’agir pour les autres selon sa foi chrétienne. Impressionné par sa stature de dissident de la fin de l’ère soviétique, comparable à celle de Soljénitsyne auparavant, Dreher commente :
« Quand nous agissons, soit en acceptant notre propre souffrance, soit en partageant celle des autres, nous devons la laisser agir en nous et nous transformer comme elle a transformé les martyrs du communisme. Elle peut nous rendre amers, attiser la colère ou l’esprit de vengeance, ou elle peut être semblable au feu du fondeur (Ma 3, 2), comme elle le fut pour Soljénitsyne et Calciu, pour Krcméry, Ogorodnikov et tant d’autres, purifiant notre amour pour Dieu et pour l’humanité souffrante… »
Oui, de part et d’autre de l’an 2000 (du 20ème au 21ème siècle), il y a bien – face au double totalitarisme de la raison sourde au divin (athéisme) et de la religion sourde à la raison (islamisme) – un œcuménisme du sang des martyrs chrétiens, comme l’affirmait saint Jean-Paul II. Et aussi un œcuménisme de la communion des saints qui franchit sans problème les frontières. Entre ton petit pèlerinage de deux jours à Chartres et l’immense parcours et offrande d’Alexandre Ogorodnikov, on ne peut savoir quel retentissement invisible, quel « effet papillon » surnaturel, ont nos gestes et nos prières, nos jeûnes et nos sacrifices dans l’immense toile spirituelle et palpitante de tous les orants de l’Église militante, souffrante et triomphante. Mais, même si cela reste un prodigieux et profond mystère, nous avons ici comme une illustration possible et sensible de ce dogme de la communion des saints (et des pécheurs). Par lequel nos bonnes actions offertes dans telle intention peuvent résonner solidairement sur les âmes souffrantes de la planète ou du Purgatoire, en union avec les mérites de l’unique sacrifice du Christ, de Marie et de tous les saints. N’hésitons pas à souffrir joyeusement par amour du prochain et de Dieu, pour notre conversion, celle des pauvres pécheurs, la compassion et le soutien des âmes qui en ont besoin : « aimer jusqu’à en avoir mal », comme dit Mère Teresa, à l’humble imitation de notre Seigneur et Frère Jésus-Christ.
Hermine (Rémi Fontaine)
(1) « Quelles choses font la joie (scoute) parfaite » dans Parole de Scout, éditions Sainte-Madeleine, 2007, p. 138.
19/12/2024
19/12/2024
Vous voici donc en marche, ô Fils de Jessé, vers la ville de vos aïeux. L’Arche du Seigneur s’est levée et s’avance, avec le Seigneur qui est en elle, vers le lieu de son repos. « Qu’ils sont beaux vos pas, ô Fille du Roi, dans l’éclat de votre chaussure » , lorsque vous venez apporter leur salut aux villes de Juda ! Les Anges vous escortent, votre fidèle Époux vous environne de toute sa tendresse, le ciel se complaît en vous, et la terre tressaille sous l’heureux poids de son Créateur et de son auguste Reine. Avancez, ô Mère de Dieu et des hommes, Propitiatoire tout-puissant où est contenue la divine Manne qui garde l’homme de la mort ! Nos cœurs vous suivent, vous accompagnent, et, comme votre Royal ancêtre , nous jurons « de ne point entrer dans notre maison, de ne point monter sur notre couche, de ne point clore nos paupières, de ne point donner le repos à nos tempes, jusqu’à ce que nous ayons trouvé dans nos cœurs une demeure pour le Seigneur que vous portez, une tente pour le Dieu de Jacob. » Venez donc, ainsi voilé sous les flancs très purs de l’Arche sacrée, ô rejeton de Jessé, jusqu’à ce que vous en sortiez pour briller aux yeux des peuples, comme un étendard de victoire. Alors les rois vaincus se tairont devant vous, et les nations vous adresseront leurs vœux. Hâtez-vous, ô Messie ! Venez vaincre tous nos ennemis, et délivrez-nous.
18/12/2024
L’antienne
O Seigneur suprême ! Adonaï ! Venez nous racheter, non plus dans votre puissance, mais dans votre humilité. Autrefois vous vous manifestâtes à Moïse, votre serviteur, au milieu d’une flamme divine ; vous donnâtes la Loi à votre peuple du sein des foudres et des éclairs : maintenant il ne s’agit plus d’effrayer, mais de sauver. C’est pourquoi votre très pure Mère Marie ayant connu, ainsi que son époux Joseph, l’Édit de l’Empereur qui va les obliger d’entreprendre le voyage de Bethléhem, s’occupe des préparatifs de votre heureuse naissance. Elle apprête pour vous, divin Soleil, les humbles langes qui couvriront votre nudité, et vous garantiront de la froidure dans ce monde que vous avez fait, à l’heure où vous paraîtrez, au sein de la nuit et du silence. C’est ainsi que vous nous délivrerez de la servitude de notre orgueil, et que votre bras se fera sentir plus puissant, alors qu’il semblera plus faible et plus immobile aux yeux des hommes. Tout est prêt, ô Jésus ! Vos langes vous attendent : partez donc bientôt et venez en Bethléhem, nous racheter des mains de notre ennemi.
17/12/2024
Et toujours plus pressante, retentit la promesse : « Voyez, tout est accompli », et finalement : « Sachez aujourd'hui que le Seigneur vient, et demain vous le verrez dans sa gloire ». Lors de la veillée, quand scintille l'arbre de lumière et que s'échangent les cadeaux, le désir inassouvi d'une autre lumière monte en nous, jusqu'à ce que sonnent les cloches de la messe de minuit et que se renouvelle, sur des autels parés de cierges et de fleurs, le miracle de Noël. Et le Verbe s'est chair. Nous voilà parvenus à l'instant bienheureux où notre attente est comblée. »
( Le mystère de Noël , conférence de sainte Edith Stein, Janvier 1931)
17/12/2024
Ce chant de Noël n'est pas un chant de Noël. C'est un hymne pour la période de l'Avent, une période liturgique qui va bien au-delà de la simple préparation de Noël.
Durant ces quatre courtes semaines, l’Église s’est historiquement concentrée sur Notre Seigneur Jésus-Christ comme l’accomplissement de toutes les prophéties et de tous les désirs humains, alors qu’elle anticipe non seulement la célébration de son incarnation à Noël, mais aussi alors qu’elle attend avec espoir son retour glorieux à la fin des temps.
Les versets de « O viens, ô viens, Emmanuel » sont tirés de sept antiennes anciennes que l'Église utilisait dans sa liturgie de prière du soir depuis bien avant le IXe siècle. Chaque année, du 17 au 23 décembre, la liturgie de l'Église entre dans une préparation plus intense et plus proche de la venue du Christ à Noël. Ce changement est perceptible dans les lectures de la messe ces jours-là, mais aussi dans la liturgie des heures de l'Église, en particulier lors de la prière du soir. Chaque soir pendant cette semaine, l'Église prie l'une de ce que l'on appelle les grandes « antiennes O » avant de réciter le cantique « Magnificat » de Notre-Dame.
Les Antiennes O invoquent Notre Seigneur en utilisant des images tirées de l'Ancien Testament : « Ô Sagesse d'en haut » ; « Ô Seigneur de la maison d'Israël » ; « Ô Racine du tronc de Jessé » ; « Ô Clé de David » ; « Ô Aurore radieuse » ; « Ô Roi des Nations » ; « Ô Emmanuel ». À ces images bibliques s'ajoutent diverses supplications telles que : « Viens nous enseigner le chemin de la connaissance ! » ; « Viens nous sauver sans tarder ! » ; « Viens libérer les prisonniers des ténèbres ! »
Chacune de ces antiennes est une belle prière en elle-même, mais chacune démontre aussi exactement comment l'Église en est venue à comprendre la relation du Christ avec les promesses et les images de Dieu si répandues dans l'Ancien Testament.
« Ô Sagesse d’en haut ! »
Isaïe a prophétisé qu’un rameau sortirait de la souche de Jessé. L’un des héritiers de Jessé serait une figure messianique et un rédempteur pour Israël.
« L’Esprit du Seigneur reposera sur lui : esprit de sagesse et d’intelligence » (Is 11, 1-2). Parce que les prophéties d’Isaïe attendent avec tant d’espoir la rédemption d’Israël et du monde entier dans les grandes promesses de Dieu, il est particulièrement le prophète du temps de l’Avent.
Mais le Christ est plus que l’Oint. Saint Paul a dit à l’Église de Corinthe que « le Christ est la puissance de Dieu et la sagesse de Dieu » (1 Co 1, 24). Le Christ est la Sagesse dont parle le livre des Proverbes comme étant l’artisan et le plaisir de Dieu (Proverbes 8). Le Fils éternel est toujours le plaisir du Père et l’Artisan par lequel toutes choses ont été faites.
L’antienne du 18 décembre : « Seigneur de la maison d’Israël, qui a donné la Loi à Moïse sur le Sinaï » est peut-être un exemple plus poignant d’une puissante image du divin dans l’Ancien Testament. Les événements relatés dans le livre de l’Exode sont d’une grandeur magnifique, du buisson ardent à la séparation de la mer Rouge, en passant par la remise de la Loi à Moïse sur un mont Sinaï couvert de tonnerre et d’éclairs.
Les Pères de l’Église ont régulièrement noté la présence du Christ dans les diverses manifestations de Dieu aux Israélites. Saint Justin le martyr rappelait : « Celui-là même qui est à la fois ange et Dieu, Seigneur et homme, et qui apparut sous forme humaine à Abraham et à Isaac, apparut aussi dans une flamme de feu sortant du buisson et conversa avec Moïse. »
Saint Grégoire de Nysse commente les événements du désert — les nuages, le tonnerre et le tabernacle de la présence de Dieu — : « Prenant comme exemple ce que dit Paul, qui a partiellement dévoilé le mystère de ces choses, nous disons que Moïse fut auparavant instruit par un type du mystère du tabernacle qui entoure l'univers. » Ce tabernacle, le Christ, le Fils de Dieu, poursuit-il, « est en quelque sorte à la fois informe et façonné, incréé dans la préexistence mais créé en ayant reçu cette composition matérielle. »
Le Fils Éternel de Dieu préexistant qui est l’image parfaite de Dieu est aussi la présence de Dieu dans le buisson ardent, sur le mont Sinaï et parfaitement dans son incarnation.
Il n’est donc pas surprenant que la version latine de cette antienne commence par « O Adonaï », empruntant le mot hébreu que les Juifs craignant Dieu utilisent lorsqu’ils lisent la Torah pour éviter de prononcer le nom propre de Dieu lui-même – c’est le nom Seigneur, le nom que saint Paul dit aux Philippiens a donné au Christ parce qu’il n’a pas considéré l’égalité avec Dieu comme quelque chose à saisir, mais s’est plutôt vidé lui-même jusqu’à la mort (cf. Philippiens 2:6-11). Jésus-Christ est Adonaï. Il est Kyrios. Il est le Seigneur.
Enfin, d'autres antiennes O identifient le Christ comme l'accomplissement de la grandeur d'Israël et du désir humain. Il est l'Oriens, l'aurore dont Isaïe a promis qu'elle se lèverait sur le peuple élu de Dieu (Isaïe 60, 1-2). Il est aussi la Racine de Jessé. Il n'est donc pas seulement l'accomplissement mais le début de la lignée israélite.
Il est le Créateur et celui par qui la lignée de David est née. Le Christ est donc à la fois le début et la fin de la promesse faite à David. Il est l'Alpha et l'Oméga. Il est celui dont l'Ancien Testament prédit qu'il régnera comme roi sur toutes les nations.
Les Antiennes O sont bien plus que de simples refrains à chanter avant le Magnificat de Notre-Dame ou à servir de versets dans un hymne de l'Avent. Elles révèlent les mystères du Christ déjà révélés dans la puissance et la gloire de Dieu dans l'Ancien Testament.
Saint Thomas d’Aquin avait raison d’insister sur le fait que de nombreux grands prophètes d’Israël avaient une connaissance prophétique réelle et explicite de Jésus et de ses mystères, même s’ils vivaient des centaines d’années avant l’Incarnation. « Abraham se réjouit de ce qu’il verrait mon jour », a prêché Jésus lui-même un jour. « Il l’a vu et il s’est réjoui » (Jn 8, 56). Le Christ est actif en Israël. Il est présent dans l’Ancien Testament.
Ces grandes antiennes nous rappellent que l’Avent ne se résume pas à la préparation de Noël. Elles nous rappellent que le Christ est le point central de l’histoire du salut et, en fait, de toute l’histoire du monde, parce qu’il est Emmanuel – « Dieu avec nous ».
La sagesse de Dieu est telle que le Seigneur nous a créés pour être en relation avec lui afin d’apporter la lumière non seulement à notre vie mais au monde. Chaque année, l’Église nous offre ces quatre semaines pour que nous nous souvenions intensément de ce que nous devons vivre chaque jour : dans la préparation, l’anticipation et la joyeuse espérance que le Seigneur viendra à nous et nous sauvera.
Ô Emmanuel, notre Roi et Donateur de la Loi : Viens nous sauver, Seigneur notre Dieu !
Père Thomas Petri, OP
Catholic World Report (USA)
17/12/2024
17/12/2024
Transcription:
Orienter la société vers la culture de vie, ce n’est pas seulement empêcher l’avortement et l’euthanasie par la loi. Car la véritable cause de la culture de mort est plus profonde : c’est la dépression morale de la société. La culture de mort est le fruit de l’athéisme et du matérialisme. C’est la volonté de puissance désespérée. Orienter la société vers la culture de vie, c’est d’abord rendre à la société sa vitalité : la joie et la fierté d’exister. C’est faire sortir la société de la dépression morale.
Il faut agir à trois niveaux, par ordre d’importance
Au niveau militant, politique, et religieux.
1-Combattre les artisans de la culture de mort
Il faut combattre. Nous le savons tous dans cette salle. Nous sommes tous ici des combattants. Merci à Lola et au Political Network for Values de nous rassembler à Madrid. C’est une joie d’être ensemble.
Nous devons combattre le lobby de la culture de mort à tous les niveaux, dans toutes les institutions. Dans les parlements, dans les tribunaux, à l’ONU, etc.
Combattre la culture de mort, ce n’est pas seulement combattre le Planning Familial et les fondations Ford, Rokefeller, Soros, Gates et Buffet. Il faut aussi combattre ceux qui veulent avilir la vie, ceux qui veulent rendre la vie laide et triste : ceux qui promeuvent le désespoir, la drogue, la prostitution, la pornographie, et la mauvaise éducation sexuelle. Or, ce sont ces mêmes fondations qui promeuvent aussi l’avortement et l’euthanasie.
Ce combat pour la vie, nous le menons dans les institutions, à Genève, Strasbourg, New York, Bruxelles, Washington, San José et ailleurs ; nous menons ce combat comme des soldats sur un champ de bataille. Mais cela ne suffit pas, nous devons voir plus loin, nous devons aussi nous engager pour que la société soit de nouveau conquise par la culture de vie. C’est le deuxième niveau d’action, véritablement politique.
2-Action au niveau politique: il faut aimer la vie et croire en son destin
Les peuples européens n’ont plus d’enfants parce qu’ils ont perdu le goût de la vie et ne croient plus en leur avenir, en leur destin.
Le vrai problème est que les peuples européens sont devenus dépressifs; c’est cela le problème principal : ils ne croient plus en leur avenir. Trop d’européens sont résignés au suicide démographique et au remplacement par l’immigration.
La culture de vie, aujourd’hui exige de renverser cette dépression terrible. Il faut rendre aux peuples européens le goût de la vie et la vision de leur avenir.
Je vois deux conditions pour cela :
Il faut d’abord aimer la vie, et il faut croire en son destin.
Aimer la vie. Cela paraît évident, mais il y a un travail énorme à faire, en particulier avec la jeunesse qui a grandi dans une culture sinistre. Il faut dire et répéter que la vie est magnifique, et que le monde est splendide. Il faut cultiver la vie, la culture et la joie.
La seconde condition pour lutter contre la dépression des peuples européens, est de croire en notre avenir, en notre destin.
Un peuple qui a honte de son passé et qui ne croit plus en son destin est déjà sorti de l’histoire.
À l’inverse, les « migrants » qui traversent l’Afrique et la Méditerranée au risque de leur vie ont une force immense, car ils doivent doit lutter pour vivre et croire en leur destin. Parmi eux, les musulmans immigrés en Europe savent pourquoi ils ont des enfants: ils croient que leur avenir est de conquérir l’Europe. Même s’ils sont pauvres, ils savent pourquoi avoir des enfants.
Il en est de même du peuple juif qui survit et traverse toutes les épreuves parce qu’il croit en son destin, et il sait pourquoi avoir des enfants.
C’est dans la dynamique d’un destin collectif, familial, professionnel et national que les personnes deviennent fécondes, qu’elles parviennent à l’excellence. Il faut cette dynamique vitale.
Pour cela, il faut des chefs politiques capables de donner le goût de la vie et la vision du destin national.
Le Président français Emmanuel Macron, comme d’autres dirigeants européens, n’a pas d’enfants, et il ne croit pas que la France, ni même l’Europe, puissent encore avoir un destin qui leur soit propre. Il a renoncé au destin national, et l’a échangé contre une illusion de futur mondial. Mais c’est une illusion. Les dirigeants tels que Macron n’ont pas compris qu’ils sont les seuls à faire ce rêve mondialiste. Les autres peuples ne veulent pas se dissoudre dans l’athéisme absurde de la mondialisation occidentale, ils ne veulent pas disparaître. Ils croient encore en leur raison d’être. Ils n’ont pas honte de leur histoire.
À l’opposé d’Emmanuel Macron, il y a Donald Trump: il incarne la vitalité américaine. Il aime la vie avec puissance, et c’est pour cela qu’il la défend. L’autre force de Donald Trump, c’est qu’il a été capable de rendre aux Américains leur propre destin. Il les a convaincus et entrainés dans la dynamique de Make America Great Again (rendre à l’Amérique sa grandeur).
Avoir ces deux forces est essentiel, mais cela ne suffit toujours pas, car l’homme a besoin de se dépasser lui-même, de se transcender. Et ce serait une erreur que de l’oublier. La patrie est trop étroite pour l’homme.
3- C’est le troisième niveau d’action : le niveau de la transcendance
Les communistes, les socialistes et les néolibéraux ont compris la force de cet idéal d’autodépassement, mais ils l’ont orienté contre la personne, la famille, la nation et l’Eglise, pour en «libérer» l’homme. Ce dépassement est présenté comme un progrès, mais il est surtout une destruction de la condition humaine.
Nous voyons aujourd’hui le résultat de cette «libération»: elle détruit l’homme.
L’autre autodépassement de l’homme qui est proposé à présent, c’est le rêve scientiste et transhumaniste. Mais c’est aussi une illusion.
Les rêves d’autodépassement communiste et scientiste ont en commun le rejet de Dieu et sont des alternatives désastreuses à la religion.
C’est parce que le peuple s’est détourné de la religion qu’il a adhéré à ces idéologies de substitution, et c’est pour cette raison aussi qu’il est devenu dépressif. Car un peuple athée qui rejette son passé et refuse son destin mène une existence absurde.
Une fois encore, regardons le peuple juif.
Le peuple juif survit et traverse toutes les épreuves non seulement parce qu’il aime la vie et croit en son destin, mais surtout parce qu’il sait que son destin est lié à sa fidélité à son alliance avec Dieu.
Les Chrétiens aussi ont une Alliance avec Dieu; les peuples européens ont été baptisés et sanctifiés par des saints innombrables. C’est cette Alliance avec Dieu – qui est source de toute vie – qui est la Vie – qu’il faut rénover.
La défense de la culture de vie exige de lutter contre l’athéisme criminel, et de rendre à la société l’amour de la vie, la confiance en son destin et la respiration de son âme.
Je vous remercie.