Le blog du Temps de l'Immaculée.

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Un Ă©vĂȘque catholique : Mgr Coakley, nouveau prĂ©sident de l'Ă©piscopat amĂ©ricain

12/11/2025

Un Ă©vĂȘque catholique : Mgr Coakley, nouveau prĂ©sident de l'Ă©piscopat amĂ©ricain

Le Choix de la Continuité et la Réaction des FidÚles
Le mardi 11 novembre, Monseigneur Paul S. Coakley a Ă©tĂ© Ă©lu prĂ©sident de la ConfĂ©rence Ă©piscopale amĂ©ricaine (USCCB) aprĂšs un second tour, face Ă  Mgr Daniel Flores, dĂ©sormais vice-prĂ©sident. Ce choix n'est pas anodin : Mgr Coakley, prĂ©cĂ©demment secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de la ConfĂ©rence et archevĂȘque d’Oklahoma City depuis 2011, symbolise la continuitĂ© de la ligne conservatrice de l'Ă©piscopat.

 

À 70 ans, fort d'une licence en thĂ©ologie sacrĂ©e, Mgr Coakley s'est distinguĂ© par son engagement constant en faveur de la dignitĂ© humaine et de la promotion d'une "vĂ©ritable culture de la vie". Il a notamment rĂ©affirmĂ© que la dĂ©fense de la vie reste la "prioritĂ© prééminente" de l'action publique des catholiques, saluant en 2022 l'adoption de lois pro-vie dans son État. Il souligne d'ailleurs que « bĂątir une culture de la vie suppose de reconnaĂźtre la dignitĂ© inhĂ©rente Ă  toute personne humaine, de promouvoir des lois qui protĂšgent la vie et d’encourager une conversion profonde des cƓurs ».

 

L'Ă©lection a immĂ©diatement polarisĂ© les rĂ©actions sur les rĂ©seaux sociaux. De nombreux fidĂšles ont exprimĂ© leur soutien et leurs priĂšres pour la nouvelle direction, appelant notamment Ă  "l’unitĂ© d’une Église divisĂ©e" et souhaitant que les pasteurs soient "la voix des sans-voix".

Toutefois, des voix discordantes se sont Ă©galement fait entendre. Certains internautes ont soulevĂ© des inquiĂ©tudes concernant les liens de Mgr Coakley avec le Napa Institute, un rĂ©seau influent de catholiques conservateurs souvent perçu comme Ă©loignĂ© de la vision pastorale du pape François. Le fait qu'il ait auparavant soutenu Monseigneur Carlo Maria ViganĂČ â€“ aujourd’hui excommuniĂ© pour schisme – a Ă©galement Ă©tĂ© mis en avant comme un motif de rĂ©serve. Ces rĂ©actions tĂ©moignent de la diversitĂ© des sensibilitĂ©s et des tensions idĂ©ologiques profondes au sein du catholicisme amĂ©ricain.

Concernant l'accĂšs Ă  la communion sacramentelle des politiciens catholiques : 

Opposition au soutien politique de l'avortement : Mgr Coakley a rĂ©guliĂšrement exprimĂ© son opinion selon laquelle un homme politique catholique qui soutient publiquement l'avortement met son Ăąme en danger et cause un scandale public au sein de l'Église.

 

Soutien au refus de la communion : Il a indiquĂ© qu'il comprenait et soutenait les Ă©vĂȘques qui choisissaient de refuser la communion Ă  ces personnalitĂ©s publiques. Dans une interview en 2014, il avait notamment dĂ©clarĂ© : « Je pense que de nombreux Ă©vĂȘques n'ont pas d'autre choix que de prendre cette dĂ©cision » de refuser la communion aux hommes politiques pro-avortement. Une Ă©vidence qui mĂ©rite d'ĂȘtre rappelĂ©e ....


Bref, Mgr Coakley est un Ă©vĂȘque catholique. 

 

Le Défi du Dialogue avec Rome
L'USCCB, sous la direction de Mgr Coakley, apparaĂźt donc comme un "bloc doctrinal solide", fermement attachĂ© Ă  la tradition et aux positions morales et familiales classiques de l'Église. Cette orientation place l'Ă©piscopat amĂ©ricain dans une position de vigilance doctrinale qui ne manquera pas d'influencer le dialogue entre les États-Unis et le Saint-SiĂšge.

 

Pour le pape LĂ©on XIV, cette Ă©lection constitue un nouveau dĂ©fi. DĂ©sireux d'accompagner toutes les sensibilitĂ©s de l'Église sous l'autoritĂ© du MagistĂšre, le Souverain Pontife devra faire preuve de prudence et de discernement dans ses Ă©changes avec cet Ă©piscopat fortement ancrĂ© dans la tradition. Le dĂ©fi papal sera de maintenir un dialogue fĂ©cond avec cette direction conservatrice.

 

 


L'Ă©lection de Monseigneur Paul S. Coakley confirme la prĂ©valence d'une ligne traditionaliste et "pro-vie" au sein de l'Ă©piscopat amĂ©ricain, une orientation qui rĂ©sonne avec une partie significative du clergĂ© et des fidĂšles aux États-Unis. Si la nouvelle prĂ©sidence promet une stabilitĂ© doctrinale sur les questions de morale et de dĂ©fense de la vie, elle souligne Ă©galement les tensions internes et les clivages idĂ©ologiques qui traversent l'Église amĂ©ricaine. Dans ce contexte, l'Ăšre Coakley reprĂ©sente un moment clĂ©. Elle met Ă  l'Ă©preuve la capacitĂ© du Pape LĂ©on XIV Ă  harmoniser les diffĂ©rentes voix de l'Église universelle, en maintenant l'unitĂ© et le dialogue avec un Ă©piscopat puissant et idĂ©ologiquement cohĂ©rent. La maniĂšre dont Rome et l'USCCB vont cohabiter et collaborer au cours des prochaines annĂ©es sera Ă©videmment dĂ©terminante pour l'avenir du catholicisme sur le continent.

Deo Gratias !

Le combat spirituel de l'Europe le massacre du Bataclan, dix ans aprĂšs

12/11/2025

Le combat spirituel de l'Europe  le massacre du Bataclan, dix ans aprĂšs

D'Iben Thranholm (1) sur European Conservative :

 

Dix ans se sont Ă©coulĂ©s depuis la nuit du 13 novembre 2015, nuit oĂč le cƓur de Paris a Ă©tĂ© transpercĂ© par une vague d'attentats terroristes coordonnĂ©s qui ont coĂ»tĂ© la vie Ă  130 personnes. Parmi les plus sanglants, on compte le massacre du Bataclan, oĂč 90 spectateurs ont Ă©tĂ© abattus de sang-froid. 

 

Une seule photo de cette nuit-lĂ  m'est restĂ©e en mĂ©moire. Prise quelques minutes avant l'attaque, elle capture la joie et l'abandon. La foule est en extase. Les bras sont levĂ©s. Les sourires fusent de toutes parts. L'atmosphĂšre est Ă©lectrique, empreinte de libertĂ©, de plaisir et d'impatience. Le groupe de rock amĂ©ricain Eagles of Death Metal est sur scĂšne, et le public, emportĂ© par leur performance, semble incarner tout ce que la vie nocturne occidentale moderne prĂ©tend ĂȘtre : libĂ©rĂ©e, exubĂ©rante, insouciante. 

Mais ce concert, en apparence ordinaire, allait bientĂŽt devenir le théùtre de l'un des attentats terroristes les plus horribles de l'histoire europĂ©enne moderne. Quelques instants aprĂšs la prise de cette photographie, trois hommes armĂ©s islamistes pĂ©nĂ©trĂšrent dans la salle et ouvrirent le feu. Ce qui avait commencĂ© comme une cĂ©lĂ©bration de la vie se termina en massacre. Cette photographie est bouleversante, non seulement parce que nous connaissons dĂ©sormais la suite des Ă©vĂ©nements, mais aussi parce que, rĂ©trospectivement, l'instant qu'elle immortalise semble chargĂ© de sens, voire prophĂ©tique. 

 

Danser sur le fil 

Ce soir-lĂ , Eagles of Death Metal venait de commencer Ă  jouer l'une de ses chansons les plus populaires : « Kiss the Devil ». DĂšs les premiers accords, une grande partie du public a rĂ©pondu par le cĂ©lĂšbre geste des « cornes du diable » — l'index et l'auriculaire levĂ©s, les autres doigts repliĂ©s — un symbole popularisĂ© dans la culture rock, autrefois provocateur, aujourd'hui largement vidĂ© de son sens pour la plupart de ceux qui l'utilisent. 

Les paroles qu'ils chantaient au moment des premiers coups de feu Ă©taient : 

 

Qui aimera le Diable ? 

Qui chantera sa chanson ? 

Qui aimera le Diable et sa chanson ? 

J'aimerai le diable 

Je chanterai sa chanson 

J'aimerai le Diable et sa chanson. 

 

Quelqu'un dans la foule croyait-il vraiment qu'ils invoquaient Satan au sens propre ? Certainement pas. Tout cela faisait partie du spectacle : ironique, théùtral, sans prĂ©tention. Et pourtant, quand le mal vĂ©ritable a fait irruption dans la salle sous les traits d'hommes armĂ©s, prĂȘts Ă  massacrer, le symbolisme est devenu difficile Ă  ignorer. 

 

Pour l'esprit moderne, qui perçoit le monde en termes strictement matĂ©rialistes, de tels moments sont considĂ©rĂ©s comme de simples coĂŻncidences. La chanson et le massacre ne sont qu'un sinistre alignement d'Ă©vĂ©nements sans lien apparent. Mais pour ceux qui croient encore au sens, aux signes et aux symboles, Ă  la dimension spirituelle de la vie, la scĂšne invite Ă  une rĂ©flexion plus profonde. La question demeure : lorsqu'une culture se vide du sacrĂ© et flirte avec l'obscuritĂ©, mĂȘme par plaisanterie, s'expose-t-elle Ă  plus qu'une simple vulnĂ©rabilitĂ© politique ? RĂ©vĂšle-t-elle un vide spirituel – une maison nettoyĂ©e de fond en comble, mais terriblement sans dĂ©fense ? 

 

La parabole de la maison vide 

L'image de la foule du Bataclan Ă©voque un passage de l'Évangile selon Luc. JĂ©sus parle d'une personne libĂ©rĂ©e d'un esprit impur. L'esprit s'en va et erre dans des lieux dĂ©serts, en quĂȘte de repos. N'en trouvant aucun, il retourne auprĂšs de cette personne – Ă  « la maison » – et la trouve « balayĂ©e et rangĂ©e », mais vide. Alors, il rassemble sept autres esprits plus mĂ©chants que lui, et tous reviennent y demeurer. « Et la derniĂšre condition de cette personne », dit JĂ©sus, « est pire que la premiĂšre. »

 

Cette parabole saisissante constitue une métaphore profonde de l'état actuel de la civilisation occidentale, et plus particuliÚrement de l'Europe. Jadis façonnée et animée par le christianisme, l'Europe s'est lancée, au cours du siÚcle dernier, dans une expérience civilisationnelle sans précédent : devenir laïque, neutre sur le plan axiologique et post-religieuse.

 

La religion a Ă©tĂ© relĂ©guĂ©e Ă  la marge – d’abord socialement, puis culturellement, et enfin spirituellement. Les Ă©glises sont toujours lĂ , mais pour beaucoup, elles ne sont guĂšre plus que des curiositĂ©s architecturales ou des musĂ©es d’un passĂ© oubliĂ©. Les fĂȘtes chrĂ©tiennes figurent toujours au calendrier, mais leur signification profonde a Ă©tĂ© oubliĂ©e depuis longtemps. Les valeurs qui puisaient autrefois leur fondement dans la foi chrĂ©tienne – dignitĂ©, justice, charitĂ© – sont dĂ©sormais promues de maniĂšre abstraite, dĂ©pouillĂ©es de leur essence. La maison europĂ©enne a certes Ă©tĂ© vidĂ©e de toute substance. Mais elle n’a pas Ă©tĂ© remplie.

 

La laĂŻcitĂ© promettait de crĂ©er un espace public neutre, un lieu affranchi des dogmes religieux, oĂč chacun pourrait croire (ou ne pas croire) Ă  sa guise. Mais cette idĂ©e, sĂ©duisante en thĂ©orie, ignore une vĂ©ritĂ© fondamentale de la nature humaine : nous ne sommes pas des ĂȘtres spirituellement neutres. Nous sommes des ĂȘtres intrinsĂšquement religieux, aspirant Ă  donner un sens Ă  notre existence, Ă  appartenir Ă  une communautĂ© et Ă  transcender la rĂ©alitĂ©. Comme l’écrivait Aristote dans sa Physique : « natura abhorret a vacuo » – la nature a horreur du vide. Bien que comprise au sens physique, cette phrase demeure une puissante mĂ©taphore. Un vide, une fois créé, ne reste pas vide. Il attire quelque chose en lui.

 

Il en a Ă©tĂ© de mĂȘme en Europe. Le recul du christianisme n'a pas laissĂ© de vide. D'autres systĂšmes de croyances – certains bienveillants, d'autres profondĂ©ment inquiĂ©tants – se sont engouffrĂ©s dans la brĂšche. Certains sont de nature politique, d'autres idĂ©ologiques. Et certains, comme l'islam radical, sont ouvertement religieux et farouchement hostiles aux libertĂ©s mĂȘmes chĂšres Ă  la laĂŻcitĂ© occidentale.

 

Le retour de la religion

Aujourd'hui, dans de nombreuses rĂ©gions d'Europe, l'islam connaĂźt une croissance dĂ©mographique et une prĂ©sence de plus en plus visible et affirmĂ©e. Pour de nombreuses communautĂ©s musulmanes, la foi n'est plus une affaire privĂ©e, mais une affirmation de leur identitĂ© publique. On construit des mosquĂ©es. Le port de vĂȘtements religieux est devenu courant. La priĂšre quotidienne est pratiquĂ©e ouvertement. Et pour beaucoup de jeunes musulmans, la religion n'est pas un fardeau, mais une source de force et de sens. Ce renouveau religieux contraste fortement avec le malaise spirituel de l'Europe post-chrĂ©tienne. L'ironie est frappante : alors que les sociĂ©tĂ©s occidentales s'enorgueillissent de leur tolĂ©rance, de leur ouverture et de leur pluralisme, elles ont largement perdu le systĂšme de croyances qui leur donnait jadis leur cohĂ©rence. La foi chrĂ©tienne, qui sous-tendait la culture, le droit, l'art et l'identitĂ© europĂ©ens, n'est plus qu'un souvenir culturel.

 

Alors mĂȘme que nous nous Ă©tions persuadĂ©s que la laĂŻcitĂ© nous avait libĂ©rĂ©s de l'emprise de la religion, nous sommes aujourd'hui confrontĂ©s Ă  une ironie persistante : la religion ne disparaĂźt pas ; elle attend, elle revient et elle reconquiert les espaces que nous pensions neutres. Aucune sociĂ©tĂ© n'a jamais Ă©tĂ© vĂ©ritablement neutre sur le plan spirituel. Lorsqu'une vision du monde dominante est rejetĂ©e, une autre s'implante inĂ©vitablement. À la chute de l'Empire romain, le christianisme a comblĂ© le vide. À son arrivĂ©e en Scandinavie, il a supplantĂ© le paganisme nordique. Et aujourd'hui, une grande partie de ce qui fut jadis un bastion chrĂ©tien – de l'Asie Mineure Ă  l'Afrique du Nord – est dĂ©sormais sous influence islamique. La question n'est pas de savoir si la religion façonnera la sociĂ©tĂ©, mais quelle religion – et quel type de sociĂ©tĂ© elle engendrera.

 

AprĂšs les ravages des deux guerres mondiales, de nombreux EuropĂ©ens ont placĂ© leurs espoirs dans la modernitĂ© laĂŻque. La science, la dĂ©mocratie et les droits de l'homme devaient constituer le nouveau socle moral. Pendant un temps, cette vision sembla fonctionner. La croissance Ă©conomique s'est accĂ©lĂ©rĂ©e. L'Ă©ducation s'est dĂ©veloppĂ©e. La religion a dĂ©clinĂ© sans consĂ©quence immĂ©diate. Mais avec le temps, des failles sont apparues. Sans fondement spirituel commun, la sociĂ©tĂ© se fragmente. La solitude, l'anxiĂ©tĂ© et l'aliĂ©nation progressent. Les familles se dĂ©chirent. Le discours politique s'envenime. Dans ce vide de sens, de nouvelles formes de croyance – certaines se dissimulant sous le couvert de la politique, d'autres sous celui de mouvements identitaires – s'implantent progressivement. 

 

L'islam est l'exemple le plus frappant de ce qui comble le vide spirituel laissĂ© par le rejet du christianisme en Occident. Mais il n'est pas le seul. On peut citer Ă©galement les cultes de la personnalitĂ©, les rĂȘves transhumanistes de salut technologique, l'apocalypse climatique et les mouvements nihilistes qui glorifient la destruction pour elle-mĂȘme. Il ne s'agit pas de modes passagĂšres, mais de l'expression d'une soif plus profonde : une soif d'identitĂ© et de sens que la laĂŻcitĂ© ne peut apaiser. En l'absence de christianisme, ces forces s'empressent d'offrir un sentiment d'appartenance, un but et une vĂ©ritĂ©, aussi dĂ©formĂ©e ou incomplĂšte soit-elle.

 

Le Bataclan n'Ă©tait pas qu'un simple attentat terroriste. Ce fut un moment de rupture, un aperçu du dĂ©sarroi spirituel d'une civilisation qui avait oubliĂ© ses convictions. Le fait que la foule chantait des louanges au diable lorsque le mal s'est abattu sur elle est peut-ĂȘtre une coĂŻncidence. Ou peut-ĂȘtre est-ce plus profond. Sur le plan symbolique, celui du sens, c'Ă©tait une parabole de l'Évangile de Luc qui se dĂ©roulait sous nos yeux.

 

La bataille spirituelle

L'un des aspects les plus nĂ©gligĂ©s de la crise migratoire actuelle – et des troubles internes en Europe – est qu'en dessous se cache un combat spirituel, et non seulement politique. L'apĂŽtre Paul nous rappelle dans ÉphĂ©siens 6,12 : « Car nous n'avons pas Ă  lutter contre la chair et le sang, mais contre les principautĂ©s, contre les pouvoirs, contre les dominateurs des tĂ©nĂšbres de ce monde, contre les esprits du mal dans les lieux cĂ©lestes. » Or, cette dimension spirituelle a Ă©tĂ© presque entiĂšrement oubliĂ©e, mĂȘme par l'Église elle-mĂȘme. Dans l'Europe d'aujourd'hui, l'immigration, les tensions politiques et mĂȘme le terrorisme sont perçus exclusivement comme des enjeux politiques. Et si le contrĂŽle des frontiĂšres et la souverainetĂ© nationale sont lĂ©gitimes et nĂ©cessaires, ils ne suffisent pas. Les forces spirituelles ne connaissent pas de frontiĂšres. Le combat que nous menons ne porte pas seulement sur le territoire ; il porte sur le sens, l'identitĂ© et la vĂ©ritĂ©.

 

Ce Ă  quoi nous assistons aujourd'hui n'est pas sans prĂ©cĂ©dent. Il fait Ă©cho Ă  des schĂ©mas qui se sont rĂ©pĂ©tĂ©s tout au long de l'histoire biblique – des schĂ©mas que les prophĂštes de l'Ancien Testament ont reconnus et contre lesquels ils ont mis en garde avec une luciditĂ© implacable. JĂ©rĂ©mie, IsaĂŻe, OsĂ©e et les autres prophĂštes n'Ă©taient pas de simples observateurs du dĂ©clin politique ; ils Ă©taient des hommes Ă  qui Dieu avait rĂ©vĂ©lĂ© une vĂ©ritĂ© plus profonde : lorsqu'un peuple se dĂ©tourne de son alliance avec le Dieu vivant, l'effondrement national n'est pas une possibilitĂ©, il est une consĂ©quence inĂ©vitable.

 

Dans l'histoire de l'Israël antique, se détourner de Dieu n'a jamais été un simple manquement à la piété. C'était une crise publique, qui a finalement conduit à l'effondrement de la société, à la décadence morale et à la vulnérabilité face aux ennemis extérieurs. La chute de Jérusalem en 586 av. J.-C. et l'exil babylonien n'ont pas été perçus comme des accidents de l'histoire, mais comme la conséquence directe d'une rébellion spirituelle. Comme le criait Jérémie dans son angoisse : « Voilà ce que vous avez fait ! Voilà votre chùtiment ! Qu'il est amer ! » (Jérémie 4,18).

 

IsaĂŻe, lui aussi, parlait d'un peuple qui honorait Dieu des lĂšvres, mais dont le cƓur Ă©tait loin de lui (IsaĂŻe 29:13). Il avertissait que, sans repentance, la protection divine serait retirĂ©e et que les nations Ă©trangĂšres deviendraient des instruments de jugement. Les prophĂštes ont maintes fois dĂ©clarĂ© que la justice de Dieu n'est pas indiffĂ©rente au pĂ©chĂ© collectif, et que sa misĂ©ricorde n'est pas inconditionnelle lorsque la vĂ©ritĂ© et la justice sont rejetĂ©es. Le message des prophĂštes n'Ă©tait pas une stratĂ©gie militaire, ni une rĂ©forme nationale au sens pragmatique du terme. C'Ă©tait un appel moral et spirituel. Leur appel Ă©tait inĂ©branlable et unique : Repentez-vous. Revenez au Seigneur. RĂ©parez la rupture de l'alliance avant que la destruction ne devienne inĂ©vitable.

 

Aujourd'hui, il est bon de se souvenir que ces avertissements antiques ne s'adressaient pas seulement à Israël. Ils ont été consignés pour toutes les générations, comme un miroir, un avertissement et un modÚle. Lorsque nous rejetons Dieu, que nous dénaturons la vérité et que nous détruisons notre identité, nous ne devenons pas libres ; nous devenons fragiles. Et comme l'ancien Israël, nous risquons de nous effondrer, non pas à cause de la force de nos ennemis, mais à cause du vide qui nous habite.

 

L'Occident d'aujourd'hui doit entendre le mĂȘme appel Ă  la repentance. La vĂ©ritable bataille ne se gagne pas par des lois d'immigration plus strictes ni par un nationalisme renouvelĂ©. Elle commence par un examen de conscience : un retour au sacrĂ©, une redĂ©couverte du transcendant et un rĂ©veil de l'Ăąme. Si l'Occident veut se relever, il doit d'abord affronter le vide qui le ronge. Il doit se demander Ă  nouveau : en quoi croyons-nous ? Qu'est-ce que nous vĂ©nĂ©rons ? Si nous ne rĂ©pondons pas Ă  ces questions, d'autres le feront. Et la rĂ©ponse risque de nous dĂ©plaire. 

 

 

 

(1) Iben Thranholm est une théologienne, journaliste, auteure et commentatrice culturelle danoise dont les travaux explorent les liens entre foi, culture et société. Pendant plusieurs années, elle a été rédactrice et animatrice à la radio-télévision publique danoise DR. Elle a également collaboré avec Vatican Media à Rome. Lors de son séjour au Mathias Corvinus Collegium (MCC) à Budapest, ses recherches ont porté sur la crise de sens en Occident et le mouvement croissant de renouveau chrétien au sein de la civilisation occidentale.

La femme qui a le plus compté pour Antoine de Saint-Exupéry

11/11/2025

La femme qui a le plus compté pour Antoine de Saint-Exupéry

Ce sont les circonstances qui ont favorisĂ© la proximitĂ© entre mĂšre et fils, proximitĂ© Ă©mouvante et fĂ©conde, bien qu’excessivement fusionnelle parfois. AprĂšs la mort brutale de son pĂšre, en 1904 - il a 4 ans -, puis de son frĂšre cadet en 1917 - il en a alors 17 -, voilĂ  Antoine devenu le seul homme de la maison. Veuve et mĂšre Ă©prouvĂ©e, Marie s’appuie sur ce fils un brin capricieux mais si aimant, qu’elle avait implorĂ© saint Antoine de lui donner, aprĂšs la naissance de deux filles.

 

Une relation privilégiée
Empreinte d’une touchante dĂ©licatesse, leur correspondance, partiellement dĂ©voilĂ©e au grand public, ne laisse aucun doute : ces deux-lĂ  s’aimaient d’amour tendre et Antoine n’aurait pas rejoint la cohorte de nos grands Ă©crivains et poĂštes français experts en humanitĂ© s’il n’avait Ă©tĂ© profondĂ©ment influencĂ© par sa mĂšre.

 

Enfant, il lui assurait fiĂšrement : "Vous ĂȘtes fatiguĂ©e, maman, appuyez-vous sur moi, je suis votre chevalier !". Adolescent, il ne cesse de lui rĂ©pĂ©ter combien il lui est attachĂ©, combien il l’aime "du fond du cƓur". Homme mĂ»r, dĂ©sespĂ©rĂ© par l’affaissement moral et spirituel de la France occupĂ©e, il lui Ă©crit quatre ans avant sa mort : "J’ai infiniment besoin de votre tendresse, maman chĂ©rie, ma petite maman. Pourquoi faut-il que tout ce que j’aime sur terre soit menacĂ© ? (
) La seule fontaine rafraĂźchissante, je la trouve dans certains souvenirs d’enfance."

Quelle mĂšre ne rĂȘverait se d’entendre dire "Dites-vous bien que de toutes les tendresses la vĂŽtre est la plus prĂ©cieuse et que l'on revient dans vos bras aux minutes lourdes. Et que l'on a besoin de vous, comme un petit enfant, souvent. Et que vous ĂȘtes un grand rĂ©servoir de paix et que votre image rassure autant que lorsque vous donniez du lait Ă  vos tout-petits." ? (Lettre de 1930).

 

Une influence bienfaisante et protectrice
De fait, Marie a transmis Ă  son fils son amour du beau, son attachement aux valeurs morales (courage, obĂ©issance, sens du devoir), son goĂ»t pour le silence et l’intĂ©rioritĂ©, sa foi en la dignitĂ© de tout ĂȘtre, quel qu’il soit. Convaincue du talent d’Antoine, elle ne cessa de l’encourager Ă  Ă©crire et eut la primeur de presque tous ses manuscrits. La quintessence de l’Ɠuvre de Saint-ExupĂ©ry, son humanisme tourmentĂ©, ses appels dĂ©sespĂ©rĂ©s pour la sauvegarde de la civilisation, sa quĂȘte des cimes lui viennent de sa mĂšre, sa fĂ©e tutĂ©laire. Ne lui doit-il pas d’avoir eu souvent la vie sauve, lui qui bravait parfois le danger avec un zeste d’inconscience ou la fougue d’un conquĂ©rant ? 

Ceux pour qui la communion des saints est une rĂ©alitĂ© tangible n’en douteront pas : Marie prie sans cesse pour son fils, le recommande au Tout-Puissant au cours de messes en semaine, le confie Ă  ses deux enfants appelĂ©s auprĂšs du PĂšre, François et Marie-Madeleine ("que nos anges veillent sur toi" lui Ă©crit-elle en septembre 1939, au dĂ©but de la guerre). 

Quand Antoine, en 1935, s’écrase en avion dans le dĂ©sert libyen et manque d’y laisser sa peau, sa mĂšre exhorte ses proches convaincus de sa mort Ă  prier encore et Ă  croire au miracle. ExaucĂ©e, elle se rend Ă  Assise dans le couvent de Saint-Damien pour rendre grĂące Ă  Dieu et remercier le Poverello pour son intercession. Le pilote lui avoue d’ailleurs que c’est avant tout son image qui lui a permis de tenir pendant ces trois jours d’errance oĂč la chaleur et la soif faillirent avoir raison de lui. Ne l’a-t-il pas toujours considĂ©rĂ©e comme "son ange gardienne" ?

 

Médiatrice auprÚs du PÚre
Marie ne s’est pas contentĂ©e d’implorer le Seigneur pour la protection de son fils. Meurtrie que ce dernier ait perdu Sa trace aprĂšs la mort de son petit frĂšre, elle ne cessa jamais de prier pour qu’il retrouve la foi. En 1940, elle adresse Ă  Antoine ces mots bouleversants : "Je voudrais que tu sois en paix, je dis au bon Dieu que je prends tout sur moi, tout ce qui dans ta vie a pu ĂȘtre imparfait, je Lui dis aussi que tu as fait beaucoup de bien, que tes livres ont rĂ©veillĂ© beaucoup d'Ăąmes."

Telle sainte Monique, la mĂšre de saint Augustin, elle ne perdit jamais l’espoir d’ĂȘtre exaucĂ©e un jour
 et ce jour vint. Plus d’un an aprĂšs la disparition de son fils, en septembre 1945, elle eut une vision qu’elle transcrivit dans un poĂšme : Antoine dans la maison du PĂšre accueilli par tous ses proches morts avant lui


Ce que le livre posthume de l’écrivain poĂšte Citadelle lui faisait pressentir se rĂ©vĂ©lait donc vrai : Ă  la toute fin de sa traversĂ©e terrestre, l’auteur du Petit Prince avait retrouvĂ© le Dieu de son enfance ! Dans cet ultime manuscrit, Antoine n’écrivait-il pas, sans doute en mĂ©moire de sa foi en la vertu des priĂšres maternelles : "Je ne connais qu'un acte fertile qui est la priĂšre, mais je connais aussi que tout acte est priĂšre s'il est don de soi pour devenir." ? L’une des nombreuses apostrophes adressĂ©es au CrĂ©ateur par un vieux souverain du dĂ©sert, personnage-clĂ© de ce recueil : "Seigneur, je vais Ă  toi, selon ta grĂące, le long de la pente qui fait devenir" ne fait-elle pas Ă©cho Ă  une exhortation de sa mĂšre, aprĂšs la parution de Courrier Sud en 1929, soit 15 ans plus tĂŽt "Abandonne-toi au Seigneur, rĂ©pĂšte-Lui chaque jour : Seigneur je vais Ă  Toi selon Ta grĂące. Ta foi n'est pas Ă©teinte puisque tu n'as pas perdu l'essentiel : le goĂ»t de Dieu." ? Cette lecture avait convaincu Marie que son fils Ă©tait revenu Ă  Dieu. Sa vision acheva de l’en convaincre et lui rendit la paix, paix qu’elle avait implorĂ© le PĂšre de lui donner : "Mon Dieu, vous m'avez tout repris/ Donnez-moi la paix Ă  ce prix."

 

Raphaëlle Coquebert dans ALETEIA

 

Lettres à sa mÚre, Antoine de Saint-Exupéry, Gallimard, 1997, 8 euros.

 

 

Marie Co-rédemptrice et médiatrice de toutes grùces : au fond, une évidence

10/11/2025

Marie Co-rédemptrice et médiatrice de toutes grùces : au fond, une évidence

Elle est la Vierge ImmaculĂ©e, pleine de grĂące dĂšs sa conception, la plus belle de toutes les crĂ©atures. Par son oui, libre et amoureux, elle est « cause de salut pour elle-mĂȘme et pour tout le genre humain », comme l’affirmait avec force saint IrĂ©nĂ©e ; elle est la Fille obĂ©issante du PĂšre, la MĂšre du Fils de Dieu, l’Epouse de l’Esprit Saint qui la prit sous son ombre quand elle eut consenti Ă  l’Incarnation
 Comment, si tout cela est vrai (et c’est bien ce que l’Eglise nous demande de croire), Marie ne serait-elle pas co-rĂ©demptrice et mĂ©diatrice de toutes grĂąces ? Par elle, grĂące Ă  elle, JĂ©sus-Christ, notre unique Salut, est entrĂ© dans le monde pour y rĂ©aliser l’Ɠuvre de la RĂ©demption. Marie a consenti Ă  son sacrifice, elle s’y est associĂ©e librement et sans rĂ©serve, elle donne son Fils par tout son ĂȘtre, de toute son Ăąme et de tout son corps.

 

Et d’ailleurs s’il est demandĂ© Ă  chacun de nous-autres, pauvres pĂ©cheurs, d’achever dans sa chair ce qui manque Ă  la passion du Christ, c’est-Ă -dire de coopĂ©rer Ă  l’Ɠuvre de la RĂ©demption, combien plus peut-on dire que Marie la toute sainte y a coopĂ©rĂ© de maniĂšre unique et prééminente ? Si on ne peut dire qu’elle est co-rĂ©demptrice, notre propre coopĂ©ration au salut n’existe plus


 

Mater Populi Fidelis, la note du DicastĂšre pour la Doctrine de la foi qui refuse d’attribuer explicitement ces titres de co-rĂ©demptrice et de mĂ©diatrice de toutes les grĂąces Ă  la TrĂšs Sainte Vierge Marie, suggĂšre qu’ils ne sont pas erronĂ©s, mais qu’il ne faut pas les dire. Notamment parce qu’ils exigent quelques explications. Nul ne conteste ce dernier point, mais est-ce vraiment une raison acceptable pour refuser de proclamer une vĂ©ritĂ© ? Nous savons bien que le mystĂšre nous dĂ©passe et que son expression exige des explications claires. Le dogme se dĂ©finit


 

 

Marie Co-rédemptrice et médiatrice de toutes grùces : une évidence « inopportune » ?
La Note affirme donc que la proclamation de ces titres est « toujours inopportune ».

Comme si la chose n’était pas importante, comme s’il n’était pas urgent de dire et redire, sur tous les tons, avec amour et parce qu’il nous faut honorer pĂšre et mĂšre, le rĂŽle incomparable, quoiqu’évidemment subordonnĂ©, jouĂ© par la Vierge dans l’économie du salut
 S’il est une co-rĂ©demptrice et une mĂ©diatrice de toutes les grĂąces, c’est cela prĂ©cisĂ©ment qui nous dit que nous devons aller Ă  JĂ©sus par Marie. C’est le secret de Marie qu’enseigne encore et toujours saint Louis-Marie Grignion de Montfort. Totus Tuus disait Ă  sa suite la devise de Jean-Paul II


 

Marie est MĂšre de Dieu. En faisant l’offrande de son Fils au temple, elle a consenti Ă  toute la volontĂ© de Dieu, de la Sainte TrinitĂ©, au sujet de son plan de salut. Au glaive qui transpercerait son Ăąme et aux clous et Ă  la lance qui transperceraient le corps de JĂ©sus.

 

Marie est MĂ©diatrice. Au jour des noces de Cana, alors que l’heure de la mort de notre Seigneur n’était pas encore venue, elle a prĂ©sentĂ© les besoins des Ă©poux Ă  son Fils, et elle a obtenu la grĂące du bon vin, figure du sang qui allait ĂȘtre versĂ© par le CrucifiĂ©.

 

Marie la toute innocente est Avocate au pied de la Croix. Elle a vu le plus innocent des hommes torturĂ© et souffrant avant de subir cette mort Ă  laquelle elle a consenti. Dans n’importe quel procĂšs humain, elle aurait Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e comme partie civile, en droit de dĂ©noncer l’iniquitĂ© de la crucifixion, et demander rĂ©paration. Mais non, elle plaide pour nous, pauvres pĂ©cheurs qui lui demandons, dans chaque Ave Maria, grĂące pour les malfaiteurs que nous sommes. Pour que nos fautes dont elle a si cruellement souffert soient effacĂ©es et rĂ©parĂ©es.

 

 

Marie Co-rĂ©demptrice et mĂ©diatrice parce qu’elle est MĂšre
Marie est MĂšre au pied de la Croix, elle a compati aux souffrances de son fils. Toute femme ayant donnĂ© la vie comprend qu’une mĂšre souffre presque autant que son enfant de la douleur et des souffrances qui le frappent. Marie a Ă©tĂ© vĂ©ritablement associĂ©e au sacrifice rĂ©dempteur. Elle y a participĂ© d’une maniĂšre inconcevable pour le commun des mortels, car il n’y a en elle, pleine de grĂące, qu’amour de Dieu.

 

Marie est MĂšre de tous les hommes depuis l’instant oĂč JĂ©sus a exprimĂ© cette derniĂšre volontĂ©. Quelle mĂšre serait-elle si elle ne donnait pas Ă  ses enfants qui l’implorent les grĂąces obtenues par son Fils du fait de son indispensable « oui » Ă  elle ?

 

Elle est MĂšre de l’Eglise qui nous distribue et communique son Fils lui-mĂȘme. Hors de l’Eglise, point de salut. Ne pourrait-on pas dire dĂšs lors : « Fors Marie, point de salut ? » On n’a pas l’une sans l’autre


 

Elle est Reine du Ciel et Reine de l’Univers – ce Cosmos dont je me plais Ă  penser qu’il fut sa dot, de telle sorte que le CrĂ©ateur le conçut merveilleusement beau


 

Elle est la Reine-MĂšre de Notre Seigneur qui est notre Roi
 N’est-il pas vrai que dans l’Ancien Testament, c’est la mĂšre du roi qui est assise Ă  sa droite et que mĂȘme le roi se lĂšve Ă  son entrĂ©e ? N’est-ce pas elle qui est chargĂ©e de prĂ©senter les demandes du peuple, et que le Roi les honore non par devoir, mais par amour filial ?

 

« Faites tout ce qu’Il vous dira », dit la Vierge MĂšre Ă  Cana, car elle sait qu’elle sera elle-mĂȘme entendue, Ă©coutĂ©e, exaucĂ©e.

Par amour filial Ă  notre tour, et parce qu’elle nous donne Dieu lui-mĂȘme, nous honorons en elle la Co-rĂ©demptrice et la MĂ©diatrice de toutes grĂąces.

 

Jeanne Smits RITV

La sainteté, une folie raisonnable

09/11/2025

La sainteté, une folie raisonnable

Célébrer les saints, honorer les morts
Avec la pĂ©dagogie qu’on lui connaĂźt, l’Église, en ce dĂ©but du mois de novembre, ne lie donc point par hasard la fĂȘte de la Toussaint avec celle de la commĂ©moraison des fidĂšles dĂ©funts.

 

CĂ©lĂ©brer les saints qui, ici-bas, ont vĂ©cu en amis de JĂ©sus et ont manifestĂ© de maniĂšre significative la puissance de la victoire du Christ dans leur Ăąme ; honorer les morts qui, entrĂ©s dans leur Ă©ternitĂ©, rĂ©clament nos priĂšres pour se laisser, Ă  leur tour et Ă  la suite des saints, possĂ©der par Dieu tout entier. Une mĂ©ditation s’impose : si la mort fait partie de la vie, il s’agit de ne pas oublier trop vite aussi que la saintetĂ© doit faire partie de la vie chrĂ©tienne. Ou, Ă  dĂ©faut qu’elle n’en tienne la meilleure place, ambitionner Ă  tout le moins de commencer Ă  l’avoir pour but.

 

« Que demandez-vous Ă  l’Église de Dieu ? » interroge le ministre au commencement du rituel du baptĂȘme, « La Foi ! » rĂ©pondent les parrain et marraine. « Que vous procure la foi ? », « La vie Ă©ternelle ! ». Ainsi, cet ĂȘtre de sang et de boue qu’est l’homme se trouve appelĂ©, dĂšs le frĂ©missement de la vie en lui, au plus glorieux des hĂ©ritages. Dieu veut que l’humanitĂ© dans son ensemble relĂšve la tĂȘte vers la lumiĂšre, cette « lumiĂšre vĂ©ritable » (Jn 1, 9) qui brille dans la personne de son fils, jaillit de son Évangile et Ă©clate dans l’enseignement constant de son Église.

 

« La foi, expliquait, espiĂšgle, Gustave Thibon, c’est la noblesse de l’homme qui, une fois dĂ©grisĂ©, tient ses promesses d’ivrogne. » Oui, il y a dans l’hygiĂšne de vie chrĂ©tienne – celle-lĂ  qui fait les saints – quelque chose de profondĂ©ment contre-intuitif et d’apparence dĂ©raisonnable. Cette foi, qui donne droit Ă  la vie Ă©ternelle, paraĂźt, Ă  vue humaine, insensĂ©e.

 

Elle fait rire les mondains et suscite l’ironie des puissants, comme on a pu le voir derniĂšrement Ă  l’occasion du succĂšs du film SacrĂ© CƓur, contre tous les pronostics et les coups bas de l’entre-soi « mĂ©diatiquement correct ». À ce monde du spectacle, saint Paul pourrait Ă  nouveau lancer ses percutantes envolĂ©es sur la folie raisonnable du message divin. Sa premiĂšre lettre aux Corinthiens en est truffĂ©e :

 

« Dieu a choisi ce qui est folie pour le monde afin de confondre les sages. » (1 Co 1, 27)

« Que personne ne s’y trompe : si quelqu’un parmi vous se croit sage selon ce monde, qu’il devienne fou pour devenir sage. Car la sagesse de ce monde est folie devant Dieu. » (1 Co 3, 18-19)

« Nous sommes fous à cause du Christ. » (1 Co 4, 10)

« Car ce qui serait folie de Dieu est plus sage que la sagesse des hommes. » (1 Co 1, 25)

 

Tel est l’enjeu de notre propre conversion : devenir raisonnablement fou. S’interdire d’apprĂ©hender la saintetĂ© comme une affaire de dĂ©veloppement personnel, s’empĂȘcher de croire que l’amitiĂ© avec Dieu est question de recette. On ne s’initie pas Ă  la saintetĂ© selon la mĂȘme logique cognitive de l’apprentissage d’une langue Ă©trangĂšre. Pas d’application DuoSancto comme Duolingo.

 

 

De mĂȘme, pas de croissance dans la grĂące Ă  la maniĂšre d’une prise de masse musculaire. Pratiquer les commandements rĂ©clame tout autre chose qu’une docilitĂ© scrupuleuse Ă  des exercices quotidiens, tels qu’ils peuvent ĂȘtre prĂ©conisĂ©s par le youtubeur Tibo InShape. 

 

Aimer Dieu follement avec toute sa raison
Qu’est-ce que la saintetĂ©, sinon d’aimer Dieu follement avec toute sa raison ? L’aimer et lui plaire certes, mais avec une prĂ©cision de taille : « en tĂąchant d’anĂ©antir son amour-propre pour faire vivre et rĂ©gner l’amour de Dieu » (saint François de Sales).

 

ReconnaĂźtre l’incohĂ©rence de ses certitudes pour vivre de l’amour de Dieu, c’est cet « anĂ©antissement de l’amour-propre » dont Bruno Guillot a fait l’expĂ©rience saisissante, jusqu’à modifier le cours de sa vie : Belge converti au salafisme, imam repenti redevenu catholique, vous pourrez lire son formidable tĂ©moignage dans ce numĂ©ro.

 

« Faire vivre et rĂ©gner l’amour de Dieu », c’est encore tout le projet du CongrĂšs Mission qui se tient actuellement Ă  Paris-Bercy et qui s’attache Ă  rassembler, sans exclusive, tous ceux qui aspirent Ă  diffuser le message d’amour et de vĂ©ritĂ© de l’Église. Comme quoi, la saintetĂ© n’a pas dit son dernier mot. Et vous ?

 

PĂšre Danziec dans l'Homme Nouveau

LĂ©on XIV convoque un consistoire extraordinaire: un nouveau souffle d'unitĂ© pour l'Église

08/11/2025

LĂ©on XIV convoque un consistoire extraordinaire: un nouveau souffle d'unitĂ© pour l'Église

C’est prĂ©cisĂ©ment ce dernier type de consistoire qui caractĂ©rise la convocation que le pape LĂ©on XIV entend tenir au dĂ©but de l’annĂ©e prochaine. Dans une communication confidentielle adressĂ©e le 6 novembre par le SecrĂ©tariat d’État aux membres du SacrĂ© CollĂšge , il est indiquĂ© que « le Saint-PĂšre LĂ©on XIV entend convoquer un consistoire extraordinaire les 7 et 8 janvier 2026 ». La note, signĂ©e avec la formule de respect habituelle, prĂ©cise simplement que le doyen du CollĂšge des cardinaux communiquera en temps voulu les dĂ©tails officiels. Rien n'a encore Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© quant au thĂšme de la rĂ©union, mais cette annonce suffit Ă  susciter attente et interrogations .

 

AprĂšs des annĂ©es oĂč la gouvernance de l'Église s'est exercĂ©e par des cercles restreints  et des instances parallĂšles – comme le Conseil des Neuf Cardinaux instituĂ© par le pape François et surnommĂ© au Vatican « le Conseil du Roi » –, LĂ©on XIV semble dĂ©sormais dĂ©terminĂ© Ă  redonner au CollĂšge des Cardinaux son rĂŽle originel : conseiller le pape de maniĂšre collĂ©giale et universelle . Le 21 avril 2025 , le Conseil a Ă©tĂ© dissous et les thĂ©ologiennes invitĂ©es Ă  s'exprimer sur l' ordination des femmes et autres sujets mineurs sont rentrĂ©es chez elles.

 

Avant François, BenoĂźt XVI prĂ©fĂ©rait remplacer ces instances par des rĂ©unions informelles Ă  la veille de la crĂ©ation de nouveaux cardinaux, tandis que saint Jean-Paul II convoqua six consistoires extraordinaires : trois concernant la rĂ©forme de la Curie et les finances du Vatican , et trois consacrĂ©s Ă  la doctrine et des thĂšmes pastoraux de grande portĂ©e — de la dĂ©fense de la vie Ă  la prĂ©paration du JubilĂ© de l’an 2000 , et enfin la rĂ©flexion sur la mission de l’Église au XXIe siĂšcle Ă  la lumiĂšre de l’ encyclique Novo Millennio Ineunte (2001). Le premier consistoire extraordinaire du pape François remonte aux 20 et 21 fĂ©vrier 2014 , lorsque les cardinaux se sont rĂ©unis pour discuter de la famille , en prĂ©paration des deux synodes de 2014 et 2015. Les 29 et 30 aoĂ»t 2022 , malgrĂ© la mention d’une « rĂ©union de cardinaux » par le Bureau de presse du Saint-SiĂšge, il s’agissait en rĂ©alitĂ© d’un consistoire extraordinaire convoquĂ© pour « informer les cardinaux » de la nouvelle constitution apostolique Praedicate Evangelium concernant la rĂ©forme de la Curie romaine . À cette occasion, plusieurs cardinaux ont dĂ©plorĂ© d’avoir Ă©tĂ© convoquĂ©s seulement aprĂšs la publication du document, un texte qui restructurait l’ensemble de la Curie .         

                

Un signe de mĂ©thode , avant mĂȘme toute question de contenu. 
Ce geste de LĂ©on XIV revĂȘt une signification qui dĂ©passe le sujet qui sera abordĂ©. La forme mĂȘme du consistoire symbolise un retour Ă  la collĂ©gialitĂ© ecclĂ©siale , aprĂšs une longue pĂ©riode durant laquelle de nombreux cardinaux ont dĂ©plorĂ© leur exclusion des processus dĂ©cisionnels . Ce n'est pas un hasard si, lors des congrĂ©gations gĂ©nĂ©rales prĂ©cĂ©dant le conclave , plusieurs cardinaux avaient exprimĂ© le dĂ©sir d'un pape capable d'Ă©couter et d' associer l'ensemble du cardinalat .

 

LĂ©on XIV semble dĂ©terminĂ© Ă  rĂ©pondre Ă  cette attente, en choisissant de convoquer tous les cardinaux , et non seulement un petit groupe de conseillers de confiance ou de « thĂ©ologiens ». Dans l'attente du thĂšme, on a le sentiment que ce consistoire extraordinaire pourrait marquer un tournant , non pas tant par ce qui sera dit , mais par ce qu'il reprĂ©sente . Une Église qui retrouve le droit de dĂ©libĂ©rer ensemble , en prĂ©sence de son Pasteur , est dĂ©jĂ  une Église qui respire Ă  nouveau pleinement .        

 

Source : Silere non Possum (Italie)

 

Un constat glaçant sur la liberté religieuse mondiale

07/11/2025

Un constat glaçant sur la liberté religieuse mondiale

Un droit fondamental bafoué : Le Rapport 2025 de l'AED
Le Rapport 2025 sur la libertĂ© religieuse dans le monde, rĂ©alisĂ© par la fondation pontificale Aide Ă  l'Église en DĂ©tresse (AED), dresse un Ă©tat des lieux dramatique de la situation entre janvier 2023 et dĂ©cembre 2024.

 

Deux tiers de l'humanité menacés
PortĂ©e et Aggravation : Sur 196 pays Ă©tudiĂ©s, plus de 5,4 milliards de personnes (soit prĂšs des deux tiers de l'humanitĂ©) vivent dans un État oĂč la libertĂ© religieuse est gravement menacĂ©e.

Pays de PersĂ©cution : 24 pays sont classĂ©s dans la catĂ©gorie la plus grave, celle de la persĂ©cution, oĂč les violations sont "graves et systĂ©miques". Cela concerne plus de 1,4 milliard de personnes dans des pays comme la Chine, la CorĂ©e du Nord, l'Inde, le Nigeria et le Nicaragua.

Pays de Discrimination : 38 pays sont classĂ©s dans la catĂ©gorie des discriminations, oĂč les groupes religieux (soit 1,3 milliard de personnes) font face Ă  des restrictions de culte et d'expression, notamment l'Égypte, l'Éthiopie et la Turquie.

Situation en DĂ©clin : L'Ă©tat global de la libertĂ© religieuse ne s'est pas amĂ©liorĂ© depuis le prĂ©cĂ©dent rapport, avec une aggravation de la situation dans 75% des pays de persĂ©cution. Seuls le Sri Lanka et le Kazakhstan ont montrĂ© une lĂ©gĂšre amĂ©lioration, tout en restant des pays oĂč les droits sont encore profondĂ©ment bafouĂ©s.

 

Le bilan particuliÚrement lourd pour les Chrétiens
Le christianisme reste la confession la plus touchée par la violence et la répression :

 

Chiffres alarmants : Un chrĂ©tien sur six dans le monde vit dans un pays oĂč les persĂ©cutions antichrĂ©tiennes reprĂ©sentent une menace forte.

Exemples de Violences :

Au NigĂ©ria, plus de 1 600 victimes chrĂ©tiennes ont Ă©tĂ© recensĂ©es depuis 2023, la majoritĂ© Ă©tant victimes des violences menĂ©es par Boko Haram et l'État islamique.

En Chine, le rapport fait état de morts sous la torture, de la surveillance électronique des églises et de l'interdiction formelle faite aux mineurs d'assister à la messe.

En Irak, des centaines de chrĂ©tiens auraient Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s, avec des interdictions similaires de pratique religieuse pour les mineurs.

 

L'Europe n'est pas épargnée par les actes antichrétiens
Bien que l'Occident ne soit pas classé dans les catégories de violations graves, le rapport note une augmentation significative des attaques contre les sites et les fidÚles chrétiens :

 

La France en tĂȘte : Avec environ 1 000 actes anti-chrĂ©tiens enregistrĂ©s en 2023, la France est identifiĂ©e par AmĂ©lie Berthelin de l'AED comme le pays d'Europe le plus touchĂ© par ce type d'actes.

Autres pays concernĂ©s : La GrĂšce (plus de 600 cas de vandalisme d'Ă©glises), l'Italie, l'Espagne, les États-Unis et la Croatie sont Ă©galement citĂ©s pour des profanations de lieux de culte, des agressions de membres du clergĂ© et des perturbations d'offices religieux.

 

Un appel Ă  la conscience et Ă  l'action
Face Ă  cette "souffrance cachĂ©e", l'AED passe Ă  l'action en lançant, pour la premiĂšre fois de son histoire, une pĂ©tition mondiale pour la protection du droit Ă  la libertĂ© religieuse. L'objectif est double : susciter une rĂ©elle prise de conscience auprĂšs des signataires et, surtout, interpeller les responsables politiques afin qu'ils "prennent Ă  leur tour la mesure de l’enjeu". L'urgence de la situation globale ne fait que souligner la nĂ©cessitĂ© de cet engagement.

La carriĂšre internationale du film SacrĂ©-CƓur a dĂ©jĂ  commencĂ©

06/11/2025

La carriĂšre internationale du film SacrĂ©-CƓur a dĂ©jĂ  commencĂ©

Il fallait sans doute cela pour rĂ©veiller les consciences. Il fallait un film capable de dĂ©placer les foules, croyantes ou non, un film qui parle d’amour, du seul vĂ©ritable amour, celui qui se donne sans retour : l’amour du Christ. SacrĂ©-CƓur, produit et co-rĂ©alisĂ© par Steven et Sabrina Gunnell,distribuĂ© par SAJE Distribution, a su toucher le cƓur du public comme peu d’Ɠuvres contemporaines.

 

En plein triomphe en France oĂč le film s’apprĂȘte Ă  franchir le cap des 400 000 entrĂ©es, Hubert de Torcy, patron de SAJE films, a confiĂ© Ă  Tribune ChrĂ©tienne que le film  reçoit Ă©galement un accueil triomphal en Afrique et dans l’ocĂ©an Indien, avec des sorties programmĂ©es jusqu’en AmĂ©rique et en Asie : c’est une vĂ©ritable aventure missionnaire du grand Ă©cran qui ne fait que commencer et de se poursuivre. « En Belgique et en Suisse, les salles sont combles comme en France. À Monaco, le film est mĂȘme prolongĂ© devant la demande du public ».Le film, vĂ©ritable phĂ©nomĂšne, a entamĂ© sa diffusion en Afrique et dans l’ocĂ©an Indien la semaine derniĂšre. Les premiers rĂ©sultats confirment un accueil exceptionnel. « À l’üle Maurice, nous avons dĂ©passĂ© les 7 000 entrĂ©es en deux semaines. En CĂŽte d’Ivoire, c’est un vĂ©ritable carton avec plus de 2 300 entrĂ©es en un seul week-end ! » explique le distributeur français.

 

« Voici ce CƓur qui a tant aimĂ© les hommes qu’il n’a rien Ă©pargnĂ© jusqu’à s’épuiser et se consumer pour leur tĂ©moigner son amour. Et pour reconnaissance, je ne reçois de la plupart que des ingratitudes, par leurs irrĂ©vĂ©rences et leurs sacrilĂšges, et par les froideurs et les mĂ©pris qu’ils ont pour moi dans ce sacrement d’amour. »

Sainte Marguerite-Marie-Alacoque (1647-1690)

 

Et la vĂ©ritable success story de SacrĂ©-CƓur s’étend dĂ©sormais au SĂ©nĂ©gal, au Burkina Faso, au Togo, au Cameroun et en RĂ©publique dĂ©mocratique du Congo. Pour le responsable de SAJE Distribution, cette expansion tĂ©moigne d’une vĂ©ritable soif spirituelle. « Tout cela est trĂšs rĂ©jouissant. On sent que le public, partout, a besoin d’histoires vraies, lumineuses, porteuses d’espĂ©rance », souligne-t-il.Il nous confie Ă©galement que «  le film poursuivra sa route au Liban courant dĂ©cembre, avant d’arriver au Canada Ă  la mĂȘme pĂ©riode. »

 

Et l’aventure ne s’arrĂȘte pas lĂ  : « Nous prĂ©parons une version pour les États-Unis, dont la sortie est prĂ©vue Ă  l’occasion des fĂȘtes du SacrĂ©-CƓur, en juin 2026 », prĂ©cise le distributeur. Des accords sont Ă©galement en discussion avec des partenaires en Allemagne et en Espagne, tandis que l’AmĂ©rique latine se prĂ©pare Ă  accueillir le film : « Des contacts sont dĂ©jĂ  Ă©tablis au Mexique, en Colombie et au Chili ».Et la demande s’élargit encore : « De nombreuses sollicitations nous parviennent des Philippines, mais aussi de CorĂ©e du Sud », confie-t-il, avant d’ajouter avec un sourire : « Ce n’est que le dĂ©but de l’aventure internationale de SacrĂ©-CƓur. »

 

Partout oĂč il est projetĂ©, SacrĂ©-CƓur rassemble et touche les Ăąmes. De Bruxelles Ă  Abidjan, de GenĂšve Ă  Port-Louis, les spectateurs sortent bouleversĂ©s par ce film qui remet le Christ au centre des vies et des histoires humaines. Il y avait longtemps qu’un film n’avait pas su dire l’amour vrai avec autant de simplicitĂ© et de force. Dans les regards des spectateurs Ă©mus, dans les applaudissements qui montent Ă  la fin des sĂ©ances, on devine qu’il se passe quelque chose de plus grand qu’un simple succĂšs de cinĂ©ma : un rĂ©veil des cƓurs. Rappelons que les Visitandines de Nantes peinent Ă  rĂ©pondre Ă  l’avalanche de commandes de leur « Sauvegarde du SacrĂ© CƓur » ( photo).

 

Le film ne se contente pas d’émouvoir, il appelle Ă  aimer, Ă  croire, Ă  espĂ©rer. Et de mĂȘme qu’il y eut, dans les annĂ©es 90 , une « gĂ©nĂ©ration Grand Bleu », marquĂ©e par le rĂȘve et la mer, il semble qu’émerge aujourd’hui une gĂ©nĂ©ration SacrĂ©-CƓur, toute tournĂ©e vers le CƓur du CƓur de l’amour, une gĂ©nĂ©ration qui cherche, dans l’obscuritĂ© du monde, la lumiĂšre du monde.

 

Philippe Marie dans Tribune Chrétienne

À Lourdes, le cardinal Jean-Marc Aveline dĂ©nonce un climat politique et social inquiĂ©tant

06/11/2025

À Lourdes, le cardinal Jean-Marc Aveline dĂ©nonce un climat politique et social inquiĂ©tant

Le 4 novembre 2025, lors de l’ouverture de l’AssemblĂ©e plĂ©niĂšre d’automne des Ă©vĂȘques de France Ă  Lourdes, le cardinal Jean-Marc Aveline a pris la parole devant l’ensemble de l’épiscopat. S’inscrivant dans la continuitĂ© du magistĂšre de ses prĂ©dĂ©cesseurs, le cardinal Aveline a alertĂ© sur la fragilitĂ© du climat social et politique en France, affirmant que « la dĂ©mocratie elle-mĂȘme semble ĂȘtre en danger, comme le rĂ©vĂšlent la recrudescence de l’antisĂ©mitisme et l’attrait exercĂ© par des populismes devenus menaçants ». Ces mots, prononcĂ©s avec gravitĂ©, traduisent une inquiĂ©tude face Ă  la montĂ©e des divisions et Ă  la perte du sens spirituel dans la vie publique. Pour lui, la dĂ©rive du dĂ©bat dĂ©mocratique et la banalisation des discours de haine tĂ©moignent d’une crise plus profonde. Citant le patriarche BartholomĂ©e, il a rappelĂ© : « Lorsque Dieu disparaĂźt du regard humain, la terre devient un bien Ă  exploiter, l’autre un rival Ă  craindre et la vie elle-mĂȘme une marchandise. »

 

Le cardinal a Ă©galement appelĂ© Ă  une attention particuliĂšre envers les jeunes gĂ©nĂ©rations, dont il a voulu comprendre les aspirations : « Ce dĂ©sir d’identitĂ© taraude le cƓur de nombreux jeunes et nous devons le considĂ©rer positivement, le comprendre et le nourrir, afin qu’il ne soit pas rĂ©cupĂ©rĂ© pour servir d’alibi Ă  de dangereuses crispations identitaires. » Selon lui, ce besoin d’enracinement ne doit pas ĂȘtre jugĂ© mais accompagnĂ©, pour qu’il devienne un chemin d’ouverture et non de fermeture.

 

Pour Ă©clairer la mission de l’Église dans ce contexte, le cardinal Aveline s’est rĂ©fĂ©rĂ© Ă  Jean-Paul II, citant l’encyclique Dominum et vivificantem (1986) : « Il est beau et salutaire de penser que, partout oĂč l’on prie dans le monde, l’Esprit Saint, souffle vital de la priĂšre, est prĂ©sent. » Il a ajoutĂ© : « Je dois au pape Jean-Paul II d’avoir mieux compris, pour tout ce qui concerne la mission, l’urgence d’une solide thĂ©ologie trinitaire et notamment d’une pneumatologie (c’est-Ă -dire la partie de la thĂ©ologie qui Ă©tudie la personne et l’action du Saint-Esprit). » Le prĂ©lat a ensuite rĂ©sumĂ© cette vision en une formule marquante : « L’Église s’essouffle vite si elle prĂ©tend souffler Ă  la place de l’Esprit. » Cette image, simple et percutante, illustre la conviction que la fĂ©conditĂ© pastorale naĂźt de la docilitĂ© Ă  l’Esprit Saint et non d’une activitĂ© purement humaine.

 

Évoquant enfin la pensĂ©e de BenoĂźt XVI, le cardinal Aveline a rappelĂ© le dialogue que le cardinal Ratzinger avait menĂ© avec le philosophe JĂŒrgen Habermas en 2004 : « Peut-ĂȘtre nous faudra-t-il [
] avoir le courage de dĂ©noncer, grĂące Ă  la raison, les pathologies de la religion, lorsque celle-ci prĂ©fĂšre la contrainte Ă  la libertĂ©, et, dans le mĂȘme temps, dĂ©noncer, grĂące Ă  la religion, les pathologies de la raison, lorsque celle-ci choisit d’ignorer la dimension spirituelle de l’humain. » Cette rĂ©fĂ©rence, a-t-il expliquĂ©, souligne la nĂ©cessitĂ© d’un Ă©quilibre entre foi et raison pour prĂ©server la libertĂ© et la dignitĂ© de l’homme.Par ces rĂ©fĂ©rences Ă  Jean-Paul II et Ă  BenoĂźt XVI, le cardinal Aveline a voulu replacer la rĂ©flexion de l’Église de France dans la continuitĂ© d’une tradition spirituelle et intellectuelle solide. À Lourdes, son intervention a insistĂ© sur la nĂ©cessitĂ© d’un engagement lucide face aux tensions sociales et d’une fidĂ©litĂ© renouvelĂ©e Ă  l’Esprit Saint, source du vĂ©ritable discernement chrĂ©tien.

 

Source : Philippe Marie dans Tribune Chrétienne

Enseignement catholique le coup de menton du ministre

05/11/2025

Enseignement catholique  le coup de menton du ministre

Le temps d'enseignement est sacré : pas de priÚre sur les heures de cours.

Devant la commission des affaires culturelles de l’AssemblĂ©e nationale, le 4 novembre dernier, la position d'Édouard Geffray a Ă©tĂ© limpide : le temps d'enseignement, financĂ© par l'État, doit ĂȘtre exclusivement consacrĂ© Ă  l'enseignement. Chaque minute payĂ©e par le contribuable a pour unique vocation la transmission des savoirs inscrits aux programmes, sans exception.

Cette mise au point est une rĂ©ponse directe Ă  Guillaume PrĂ©vost, le nouveau secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de l’Enseignement catholique. Ce dernier avait rĂ©cemment suscitĂ© la polĂ©mique en dĂ©fendant la possibilitĂ© pour les enseignants de prier avec leurs Ă©lĂšves, invoquant la « libertĂ© pĂ©dagogique et la libertĂ© de conscience ». 

Pour asseoir son propos, le ministre a utilisĂ© une formule simple et directe, se plaçant sur le terrain du contrat qui lie l'État aux Ă©tablissements privĂ©s :
« Lorsque l’État paie un professeur, il le paie pour enseigner. Ça me semble l’évidence. Donc une minute payĂ©e par l’État, c’est une minute d’enseignement, ça ne sert pas Ă  autre chose. Et donc je ne vois pas comment, sur un temps d’enseignement, on pourrait faire une priĂšre ».

L'argument du ministre est particuliĂšrement puissant car il dĂ©place le dĂ©bat. En ramenant la question Ă  une logique de service rendu contre financement public (« une minute payĂ©e
 c’est une minute d’enseignement »), il contourne un dĂ©bat philosophique ou thĂ©ologique potentiellement sans fin sur la laĂŻcitĂ©. Il transforme l'enjeu en une question quasi managĂ©riale de respect du contrat d'association avec l'État. Pour une institution "sous contrat", un tel argument fondĂ© sur le bon sens et les obligations contractuelles devient difficile Ă  contester.

L'éducation à la sexualité : un menu unique, obligatoire pour tous

La fermeté du ministre ne s'est pas limitée à la question de la priÚre. Concernant le nouveau programme d'éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars), la ligne est tout aussi stricte. Son application est qualifiée d'obligatoire « partout », sans aucune possibilité d'adaptation ou de sélection.

LĂ  encore, Édouard Geffray rĂ©pond aux propositions de Guillaume PrĂ©vost. Bien qu'il se soit engagĂ© Ă  appliquer le programme, le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de l’Enseignement catholique avait Ă©voquĂ© la mise en place d'un « projet de rĂ©seau » spĂ©cifique Ă  ses Ă©tablissements sur ce sujet, suggĂ©rant une marge de manƓuvre.

La rĂ©plique du ministre, qu'il a lui-mĂȘme qualifiĂ©e de rĂ©ponse « en loi et en bon sens », ne laisse aucune place Ă  l'interprĂ©tation et rĂ©affirme l'autoritĂ© du programme national :
« Un programme, c’est un programme, c’est obligatoire partout. Ce n’est ni discutable, ni nĂ©gociable, ni amendable. On ne fait pas son marchĂ© dans un programme, on ne commence pas Ă  dire je le fais, je ne le fais pas, etc. ». 

Cette dĂ©claration rĂ©affirme sans dĂ©tour l'autoritĂ© de l'État sur les contenus pĂ©dagogiques fondamentaux. En refusant un « projet de rĂ©seau » spĂ©cifique, Édouard Geffray ne dĂ©fend pas seulement le programme EVARS ; il protĂšge le principe mĂȘme d'un curriculum national unifiĂ©. Accepter une exception crĂ©erait un dangereux prĂ©cĂ©dent, ouvrant la porte Ă  d'autres rĂ©seaux ou Ă©tablissements qui pourraient rĂ©clamer un traitement « Ă  la carte » sur d'autres sujets. C'est un rappel que le contrat avec l'État n'est pas un buffet oĂč l'on choisit ce qui convient. L'insistance martelĂ©e du ministre est le coup de grĂące Ă  toute ambiguĂŻtĂ© : « Je veux m’assurer que ce soit partout. Et j’ai bien dit partout. » 

Partout ? On lui souhaite bon courage ! Les enseignants musulmans feront à raison ce qu'ils veulent et le ministre – nous le savons tous – regardera ailleurs.
À la rentrĂ©e 2023, l'Enseignement catholique scolarisait 2 060 000 Ă©lĂšves. Forte de ce nombre, la hiĂ©rarchie catholique aurait tort de ne pas Ă©lever le ton pour dĂ©fendre son nouveau secrĂ©taire de l'Enseignement catholique. l'Ă©phĂ©mĂšre et faible gouvernement en place a d'autres chats Ă  fouetter !

Vive le Christ Roi !

 

 

Sources : Le Figaro, le Salon Beige et La Croix 

 

 

Tradis hors des Ă©glises ? Mise en garde du cardinal MĂŒller

04/11/2025

Tradis hors des Ă©glises ? Mise en garde du cardinal MĂŒller

Le cardinal Gerhard MĂŒller a averti que certains Ă©vĂȘques contraignent de fait les catholiques conservateurs Ă  rester chez eux ou Ă  se rĂ©fugier auprĂšs de la FraternitĂ© Saint-Pie-X. Dans un entretien approfondi avec Raymond Arroyo d'EWTN, l'ancien prĂ©fet de la CongrĂ©gation pour la Doctrine de la Foi a dĂ©clarĂ© : « J'ai entendu dire par certains Ă©vĂȘques que les catholiques qui ne souhaitent pas la nouvelle forme de la liturgie peuvent soit rester chez eux, soit rejoindre les Lefebvristes [FSSPX]. » Il a plaidĂ© pour un dialogue, affirmant : « Nous devons faire preuve d'une grande ouverture, dialoguer avec les fidĂšles dans un esprit synodal, afin de parler ensemble. »


Le cardinal MĂŒller a ajoutĂ© que ce n'est pas la messe en latin qui divise l'Église, mais plutĂŽt la bĂ©nĂ©diction des couples homosexuels, qui, selon lui, « relativise le sacrement du mariage, qui est une vĂ©ritĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e ». Il a critiquĂ© ce qu'il perçoit comme un relativisme thĂ©ologique croissant dans l'approche du Vatican en matiĂšre de dialogue interreligieux et a condamnĂ© l'Ă©tablissement d'une salle de priĂšre musulmane au sein du Vatican. « Le Vatican est le siĂšge de l'Église catholique, et y autoriser le culte non catholique revient Ă  se relativiser soi-mĂȘme », a-t-il dĂ©clarĂ©. « Cette dĂ©cision semble motivĂ©e par un dĂ©sir de paraĂźtre "ouvert" plutĂŽt que par une rĂ©flexion thĂ©ologique. »

 

Il s'est Ă©galement interrogĂ© sur la consultation des autoritĂ©s compĂ©tentes, dĂ©clarant : « J'ignore si un cardinal, la CongrĂ©gation pour la Doctrine de la Foi ou le Pape ont Ă©tĂ© consultĂ©s. Les musulmans pourraient y voir une victoire symbolique, la reconnaissance de leur prĂ©tendue supĂ©rioritĂ©. » Le cardinal MĂŒller a rĂ©affirmĂ© que les fondements de la doctrine catholique puisent leurs racines dans la philosophie grecque et romaine, telle que l'interprĂ©taient les PĂšres de l'Église, qui « reconnaissaient la part de vĂ©ritĂ© dans la philosophie, mais jamais dans les religions paĂŻennes grecques ou romaines. Ils n'ont jamais acceptĂ© les anciennes religions. »

 

Mettant en garde contre toute confusion entre les confessions, il a dĂ©clarĂ© : « Les diffĂ©rentes religions ont des conceptions diffĂ©rentes de la paix, de la libertĂ© et de la dignitĂ© de la personne. Nous ne pouvons les mĂ©langer. Nous ne sommes pas tous frĂšres. » Concernant l’ordination des femmes, il a affirmĂ© clairement : « Il est contraire Ă  la foi catholique que les femmes puissent recevoir le sacrement de l’Ordre. Seuls les hommes peuvent devenir Ă©vĂȘques, prĂȘtres ou diacres. »

 

Depuis le concile Vatican II, les divisions entre courants conservateurs et libĂ©raux au sein de l'Église catholique se sont accentuĂ©es, notamment quant Ă  l'interprĂ©tation de ses rĂ©formes. La mise en Ɠuvre de Fiducia Supplicans , qui a ouvert la voie Ă  la bĂ©nĂ©diction des couples de mĂȘme sexe, et le maintien de Traditionis Custodes , qui restreint la messe traditionnelle en latin, ont exacerbĂ© ces tensions. Nombreux sont ceux qui perçoivent dĂ©sormais un conflit naissant entre ceux qui cherchent Ă  prĂ©server la continuitĂ© doctrinale et liturgique et ceux qui promeuvent une approche plus pastorale et inclusive.


Source : Le Catholic Herald

 

Le cardinal MĂŒller, thĂ©ologien renommĂ© et l'une des figures les plus influentes du conservatisme au sein de l'Église, continue de dĂ©fendre ce qu'il appelle les « vĂ©ritĂ©s immuables de la foi » face Ă  ce qu'il perçoit comme un relativisme croissant. En 2019, il a pris la dĂ©fense de ceux qui avaient jetĂ© les statues de la Pachamama dans le Tibre, dĂ©clarant : « La grande erreur a Ă©tĂ© d'introduire les idoles dans l'Église, et non de les en expulser. » Il s'est Ă©galement montrĂ© un critique virulent du Chemin synodal allemand, qui vise Ă  libĂ©raliser la doctrine de l'Église. En 2024, il a cĂ©lĂ©brĂ© la messe pontificale solennelle traditionnelle en latin lors de la clĂŽture du pĂšlerinage de Chartres, en France.

Honorer les morts, un signe de foi

03/11/2025

Honorer les morts, un signe de foi

Le 29 octobre dernier, Ă  l’occasion d’un Ă©vĂ©nement organisĂ© Ă  l’universitĂ© du Mississipi et dĂ©diĂ© Ă  la mĂ©moire de Charlie Kirk, le vice-prĂ©sident amĂ©ricain en personne se confiait sur le gĂ©nie du christianisme. Avec conviction et assurance, JD Vance affirmait en effet Ă  la tribune :

 

« L’un de mes versets prĂ©fĂ©rĂ©s de la Bible est : “C’est Ă  leurs fruits que vous les reconnaitrez”. Je pense que les fruits de la foi chrĂ©tienne sont la civilisation la plus morale, la plus juste et la plus prospĂšre de l’histoire. Je n’ai aucune honte Ă  penser que les valeurs chrĂ©tiennes sont un fondement important dans ce pays. »

 

La religion chrĂ©tienne civilise les mƓurs

 

Il y aurait beaucoup Ă  Ă©crire sur ce que, non seulement les Etats-Unis mais aussi les pays du monde entier doivent Ă  l’Eglise. Pour cela, il suffirait de se plonger dans le superbe livre de l’historien Christophe DickĂšs, sobrement intitulĂ© Pour l’Eglise, mais prolongĂ© d’un sous-titre significatif : Ce que le monde lui doit (Perrin, 2024). Pourtant, c’est peu de le dire, entre des scandales en tout genre qui Ă©claboussent l’institution ecclĂ©siale et un personnel ecclĂ©siastique en manque de repĂšres et de figures fĂ©dĂ©ratrices, l’Eglise peine Ă  s’imposer dans le paysage politico-mĂ©diatique actuel. Le message de l’Evangile ne porte-t-il pas en lui les mĂȘmes vertus dynamiques d’il y a 2000 ans ? Au contact de l’enseignement du Christ, tout homme est censĂ© trouver Ă  sa disposition une rampe de lancement inouĂŻe : celle seule qui est en capacitĂ© de tirer ce qu’il y a de meilleur en lui. Encore faut-il prendre du temps pour son Ăąme.

 

Aussi, lorsque JD Vance affirme voir dans le christianisme un gĂ©nie particulier, le responsable politique n’a pas pour ambition de se cantonner Ă  un prosĂ©lytisme civilisationnel. En homme de foi, il sait qu’une telle attitude se rĂ©vĂ©lerait vite sĂšche et stĂ©rile. Il prĂ©cise donc, Ă  bon droit, que le Nouveau Monde, avant d’avoir Ă©tĂ© civilisĂ© par la croix, l’Evangile et l’enseignement de l’Eglise, Ă©tait en proie Ă  un paganisme Ă©hontĂ© qui pratiquait les sacrifices humains. Cette rĂ©alitĂ© historique, qui s’oppose en tout point au mythe rousseauiste du “bon sauvage” (l’homme nait naturellement bon, c’est la sociĂ©tĂ© qui le corrompt ensuite), avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© filmĂ©e par la camĂ©ra de Mel Gibson, dans Apocalypto (2006). Oui, la religion chrĂ©tienne a fait Ɠuvre de civilisation. Comment ? En commençant par infuser la charitĂ© dans les mƓurs des hommes.

 

Le christianisme confùre à l’existence un sens et se propose d’en anoblir le cours.

 

Alors que nous entrons de plein pied dans le mois de la grisaille et de la mĂ©lancolie, ce fameux mois de Novembre, qui selon les vers d’Emile Verhaeren « en son manteau grisĂątre, se blottit de peur au fond de l’ñtre », nous donne l’occasion de mĂ©diter sur une rĂ©alitĂ© Ă  laquelle la tradition culturelle et cultuelle de l’Eglise nous invite Ă  nous Ă©lever : la mort, la vie, la filiation et la saintetĂ©.

 

L’Eglise civilise nos coutumes en nous rappelant sans cesse – dans sa liturgie, dans ses priĂšres et dans son patrimoine esthĂ©tique – que nous ne venons pas de nulle part. Se mĂ©prendre sur la piĂ©tĂ© filiale qui doit ĂȘtre la nĂŽtre Ă  l’endroit de ceux qui nous ont prĂ©cĂ©dĂ©s ici-bas ne relĂšve pas seulement de l’ingratitude. L’attitude adolescente de “rĂ©voltĂ© qui ne doit rien Ă  personne” est surtout dangereusement mortifĂšre. Comment se donner soi-mĂȘme si l’on n’a pas appris Ă  remercier ? Comment cĂ©lĂ©brer le prĂ©sent si l’on se refuse Ă  honorer le passĂ© ? Dans un entretien donnĂ© au Figaro Magazine, le directeur du dĂ©partement Opinion de l’Ifop, JĂ©rĂŽme Fourquet, constatait, lucide :

 

« La citrouille d’Halloween n’a pas encore remplacĂ© le chrysanthĂšme mais on s’en approche. (
) Le substrat chrĂ©tien est en voie d’effacement. »

 

« Le héros est un homme qui se croit au-dessus des autres, le saint est un homme qui se sait avec les autres » Georges Bernanos

 

Au-delĂ  du sujet de la piĂ©tĂ© filiale, comprenons que le corpus du christianisme s’avĂšre proprement en mesure de rĂ©chauffer l’enthousiasme de la vie. En confĂ©rant Ă  l’existence un sens, il propose Ă  tout homme de se dĂ©passer sans cesse pour en anoblir le cours.

 

Entre la civilisation païenne et la civilisation chrétienne, la différence est de taille. La premiÚre conduit au transhumanisme et la deuxiÚme conduit, plus humblement quoique plus avantageusement, à devenir plus humain. Dans un recueil de textes épars de Bernanos, Les Prédestinés, la sainteté est une aventure (Le Passeur Editeur), ce contraste est souligné :

 

« Le monde admire les héros et persécute les saints. Le monde réclame des idoles, car il a peur des témoins. »

 

Et l’auteur d’expliquer que les saints ne sont pas des hĂ©ros, Ă  la maniĂšre des hĂ©ros de Plutarque. Pour Bernanos, le hĂ©ros donne l’illusion de dĂ©passer l’humanitĂ© quand le saint, lui ne la dĂ©passe pas mais l’assume. Il s’efforce mĂȘme de la rĂ©aliser le mieux possible :

 

« Le hĂ©ros est un destin, le saint est une vocation. Le hĂ©ros est seul, le saint est solidaire. Le hĂ©ros se fait admirer, le saint se fait aimer. Le hĂ©ros est un homme qui se croit au-dessus des autres, le saint est un homme qui se sait avec les autres, dans la mĂȘme misĂšre, dans la mĂȘme espĂ©rance. [
] Le hĂ©ros est un homme qui se fait dieu, le saint est un homme qui laisse Dieu se faire homme en lui. [
] Le hĂ©ros finit toujours par se trahir lui-mĂȘme, car il porte en lui la contradiction de vouloir ĂȘtre plus qu’homme sans Dieu. Le saint, lui, ne se trahit jamais, car il n’a rien Ă  dĂ©fendre que la vĂ©ritĂ© de Dieu en lui. »

 

En ce mois de novembre, honorer nos dĂ©funts consistera pour les plus initiĂ©s – les plus catĂ©chisĂ©s, j’entends – Ă  prier pour le repos de leur Ăąme, Ă  faire cĂ©lĂ©brer des messes Ă  leur mĂ©moire pour appeler sur chacun d’eux la misĂ©ricorde de Dieu. Mais il y aura toujours tout Ă  gagner que de visiter les cimetiĂšres, de fleurir les tombes de ses aĂŻeuls et de se rappeler Ă  leur bon souvenir. Tous ces gestes, tous ces rites, justement parce qu’ils peuvent paraĂźtre les plus inutiles ont leur pesant de noblesse. Ils permettent de s’inscrire sur le temps long, et nous rappeler que le pari de la foi ouvre la voie Ă  la plus belle des expĂ©riences : l’élargissement de notre horizon.

 

MĂ©ditation sur l’obĂ©issance Ă  Dieu

02/11/2025

MĂ©ditation sur l’obĂ©issance Ă  Dieu

«Mais dites-moi votre avis. Un homme avait deux enfants. S’adressant au premier, il dit : Mon enfant, va-t’en aujourd’hui travailler Ă  la vigne. Je ne veux pas, rĂ©pondit-il ; ensuite pris de remords, il y alla. S’adressant au second, il dit la mĂȘme chose ; l’autre rĂ©pondit : Entendu, Seigneur, et il n’y alla point. Lequel des deux a fait la volontĂ© du pĂšre ? » (Mt 21, 28-31).

 

Cette parabole du Sauveur peut servir d’exergue Ă  ce modeste propos. Notre vie d’ici-bas doit se mouler sur celle de notre Seigneur et Sauveur. Or que nous dit-il ? Citons-le un peu, et d’abord en saint Jean : « Ma nourriture est de faire la volontĂ© de Celui qui m’a envoyĂ© et de mener son Ɠuvre Ă  bonne fin » (Jn 4, 34). « Je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volontĂ©, mais la volontĂ© de Celui qui m’a envoyĂ© » (Jn 6, 38). De leur cĂŽtĂ©, les synoptiques ont conservĂ©, entre autres, une maxime du Sauveur sur la nĂ©cessitĂ© d’adhĂ©rer Ă  la volontĂ© divine pour rĂ©pondre Ă  notre vocation d’enfants de Dieu, vocation si fortement marquĂ©e dans le Prologue de saint Jean : « Quiconque fait la volontĂ© de Dieu, celui-lĂ  m’est un frĂšre et une sƓur et une mĂšre » (Mc 3, 35 ; cf. Mt 12, 49). Mais on pourrait multiplier les citations de ce genre. Saint Paul rĂ©sumera toute la vie du divin MaĂźtre dans cette formule de son ÉpĂźtre aux Philippiens qui est devenue cĂ©lĂšbre (citĂ©e ici dans la traduction de Crampon) : « Bien qu’il fĂ»t dans la condition de Dieu, il n’a pas retenu avidement son Ă©galitĂ© avec Dieu ; mais il s’est anĂ©anti lui-mĂȘme en prenant la condition d’esclave, en se rendant semblable aux hommes, et reconnu pour homme par tout ce qui a paru de lui ; il s’est abaissĂ© lui-mĂȘme, se faisant obĂ©issant jusqu’à la mort, et Ă  la mort de la croix » (Ph 2, 6-8). La perfection de notre union Ă  notre Sauveur se mesurera Ă  celle de notre imitation de sa vie suivant notre vocation ; ainsi accomplirons-nous le commandement que le PĂšre nous a donnĂ© au travers du saint patriarche Abraham qui est, selon l’Écriture, le pĂšre spirituel de toutes les Ăąmes de foi : « Marche devant ma face et sois parfait » (Gn 17, 1).

Ces considĂ©rations sont remplies de consĂ©quences pour notre vie de chaque jour. L’important pour nous rendre Dieu proche n’est pas d’accomplir ici-bas des Ɠuvres extraordinaires, et surtout pas celles qui nous vaudront des admirateurs (qui nous vaudront aussi, hĂ©las, des jaloux !). L’amitiĂ© avec Dieu n’exige pas davantage la multiplication des exercices religieux ni les macĂ©rations en tout genre ; elle n’implique mĂȘme pas que nous consacrions notre vie aux Ɠuvres de misĂ©ricorde, mĂȘme si celles-ci sont mises en avant par Notre Seigneur lui-mĂȘme dans le tableau qu’il nous fait du jugement dernier. Tout cela est trĂšs bon, excellent mĂȘme, mais tout cela ne fait pas forcĂ©ment de nous des amis de Dieu et de Notre Seigneur ; bref, tout cela ne nous mĂšne pas sĂ»rement Ă  cette perfection que le Tout-Puissant et son Verbe IncarnĂ© dĂ©sirent de nous. On connaĂźt le cĂ©lĂšbre passage de saint Paul (1 Cor 13, 3) : « Quand je distribuerais tous mes biens en aumĂŽnes, quand je livrerais mon corps aux flammes, si je n’ai pas la charitĂ©, cela ne me sert de rien. » C’est l’amour surnaturel de charitĂ© qui fait de nous des amis de Dieu ; c’est son intensitĂ© en nous qui marque l’intensitĂ© de notre union avec le Sauveur et son PĂšre.

 

Mais cette intensitĂ© d’union avec Dieu et avec Notre Seigneur est en lien indissoluble avec l’obĂ©issance Ă  la volontĂ© divine qui nous a Ă©tĂ© manifestĂ©e. Dans cette obĂ©issance, notre libertĂ© elle-mĂȘme se dĂ©ploie et notre volontĂ© se fortifie. Le Seigneur JĂ©sus, en effet, n’a pas voulu ĂȘtre autre chose qu’une obĂ©issance Ă  son PĂšre, comme le note l’ÉpĂźtre aux HĂ©breux (10, 5s), se faisant l’écho de l’ÉpĂźtre aux Philippiens citĂ©e plus haut : « En entrant dans le monde, le Christ dit : Tu n’as voulu ni sacrifice ni oblation ; mais tu m’as façonnĂ© un corps. Tu n’as agréé ni holocaustes ni sacrifices pour les pĂ©chĂ©s. Alors j’ai dit : “Voici, je viens, car c’est de moi qu’il est question dans le rouleau du livre, pour faire, ĂŽ Dieu, ta volontĂ©â€. » Le Christ est tout pour nous, et nous ne plairons au PĂšre que dans la mesure oĂč il retrouvera son Fils divin en nous ; et il ne le retrouvera que s’il trouve en nous les dispositions de son CƓur sacrĂ©, et avant tout celle-ci qui est prĂ©judicielle : notre souci d’accomplir constamment sa divine volontĂ©.

 

« Dans le plan de Dieu, notait un spiritain, notre programme de vie est fixĂ©, notre route est tracĂ©e ; notre tĂąche de manƓuvre consiste Ă  laisser Dieu agir, Ă  Ă©couter et comprendre, Ă  nous laisser conduire pas Ă  pas. La meilleure prĂ©occupation, touchant notre avenir et notre salut, est de nous en rapporter entiĂšrement Ă  Dieu. Personne ne peut mieux que lui pourvoir Ă  notre bien. Il est la BontĂ© mĂȘme. Il est notre PĂšre, nous sommes ses enfants. Notre plus grand ennemi est une trop grande bonne volontĂ©. Conduits par le moi, nous nous Ă©garons [
]. Dire “Oui, PĂšre !” au moment prĂ©sent, voilĂ  la saintetĂ©. Et le dire aussi par rapport Ă  l’avenir. Personne ne peut faire Ă  Dieu de plus bel hommage que de remettre, les yeux fermĂ©s, tout son avenir entre ses mains. C’est un sacrifice d’agrĂ©able odeur qui monte vers le trĂŽne du TrĂšs-Haut. Quoi que l’avenir me rĂ©serve, joies ou peines, croix ou consolations, je dis rĂ©solument : “Oui, PĂšre !” Je me fie Ă  Vous. “Ita, Pater !” telle est la signature au bas de mon programme de vie. Et je sais que par lĂ  je ne signe pas un arrĂȘt de mort, mais que je m’ouvre les perspectives du plus grand bonheur. Et pourtant je signe aussi un arrĂȘt de mort car nous devons ĂȘtre ensevelis avec le Christ pour ressusciter avec lui » (1).

Demandons Ă  la Vierge Marie cette grĂące de suivre le Christ JĂ©sus selon la voie qu’il a tracĂ©e pour nous. Avec elle, accompagnons-le dans l’obĂ©issance du Calvaire, et rĂ©jouissons-nous pour toujours de sa victoire.

 

Par un moine de Triors

 

(1) Richard Graef, cssp : Oui, PĂšre ! (Ita Pater), Éditions Le Laurier, rééd. 2004.

 

Source : LA NEF 

 

 

Commémoration de tous les fidÚles défunts

01/11/2025

Commémoration de tous les fidÚles défunts

La journĂ©e des dĂ©funts est Ă  la fois une journĂ©e de commĂ©moraison et une journĂ©e d’intercession. On fait mĂ©moire de ceux qui nous ont quittĂ©s, et l’on prie pour eux. Cette priĂšre s’enracine dans la conviction profonde que la mort ne rompt pas la communion entre les membres du Corps du Christ. L’Église enseigne que les Ăąmes appelĂ©es Ă  la vision de Dieu passent par une purification nĂ©cessaire pour ĂȘtre pleinement unies Ă  Lui. Notre priĂšre, nos sacrifices et nos Ɠuvres de charitĂ© peuvent les soutenir dans cette ultime Ă©tape, en vertu du mystĂšre de la communion des saints. Celle-ci exprime le lien spirituel et indestructible entre les vivants et les morts : dans le Christ, une vĂ©ritable solidaritĂ© unit les membres de l’Église terrestre, les Ăąmes du purgatoire et les saints du ciel.

 

Le 2 novembre, chaque fidĂšle est donc invitĂ© Ă  se recueillir, Ă  visiter les cimetiĂšres, et Ă  prier pour les dĂ©funts. Prier pour les morts, c’est poser un acte de foi et d’amour, une affirmation silencieuse de l’espĂ©rance chrĂ©tienne : la vie n’est pas dĂ©truite, elle est transformĂ©e. Pour que la Toussaint, instituĂ©e en France en 835, conserve son sens propre de fĂȘte de la gloire cĂ©leste, saint Odilon, abbĂ© de Cluny, dĂ©cida vers l’an 1000 d’instaurer, dans tous les monastĂšres de l’ordre, une messe solennelle pour les dĂ©funts le lendemain, le 2 novembre. Cette commĂ©moration, d’abord limitĂ©e Ă  la famille monastique, s’étendit rapidement Ă  toute la chrĂ©tientĂ© sous l’influence du puissant rĂ©seau clunisien. À cette Ă©poque, la doctrine du purgatoire n’était pas encore pleinement formulĂ©e, mais les moines de Cluny exprimaient dĂ©jĂ  la foi de l’Église : celle d’un Dieu misĂ©ricordieux, qui purifie et sauve. Le saint curĂ© d’Ars rĂ©sumera plus tard ce mystĂšre avec des mots simples : « Le purgatoire est l’infirmerie du Bon-Dieu. »

 

Au XVᔉ siĂšcle, les Dominicains d’Espagne introduisirent la pratique de cĂ©lĂ©brer trois messes le jour des dĂ©funts, en signe d’intercession renouvelĂ©e. Ce privilĂšge fut Ă©tendu Ă  toute l’Église par le pape BenoĂźt XV en 1915, en mĂ©moire des innombrables victimes de la PremiĂšre Guerre mondiale, afin que les prĂȘtres puissent offrir le Saint Sacrifice pour les Ăąmes de tous les dĂ©funts. Aujourd’hui encore, l’Église continue de prier avec ferveur pour ses enfants dĂ©funts. Le sanctuaire de Notre-Dame de Montligeon, en Normandie, demeure un lieu privilĂ©giĂ© oĂč des fidĂšles du monde entier confient leurs proches Ă  la misĂ©ricorde divine. Les communautĂ©s paroissiales organisent des liturgies, et de nombreux fidĂšles se rendent dans les cimetiĂšres pour prier au pied des tombes, souvent en famille, un chapelet Ă  la main.

 

Ce geste humble est un acte de foi : croire que nos morts vivent en Dieu, croire que notre priĂšre peut les accompagner vers la lumiĂšre Ă©ternelle, croire enfin que la mort ne sĂ©pare pas ceux que le Christ a unis. La sainte MĂšre Église, fidĂšle Ă  sa mission d’intercession, implore Dieu « pour les Ăąmes de tous ceux qui se sont endormis dans l’espĂ©rance de la rĂ©surrection, mais aussi en faveur de tous les hommes depuis la crĂ©ation du monde, dont le Seigneur seul connaĂźt la foi », afin qu’ils rejoignent « la communautĂ© des habitants du ciel » et jouissent du bonheur Ă©ternel.

 

Et, selon la belle parole de saint Ambroise :
« Nos morts ont Ă©tĂ© envoyĂ©s non pas loin de nous, mais avant nous — eux que la mort ne prendra pas mais que l’éternitĂ© recevra. » Ainsi, la commĂ©moration du 2 novembre n’est pas une journĂ©e de tristesse, mais une fĂȘte d’espĂ©rance, celle de la fidĂ©litĂ© de Dieu et de la communion sans fin entre les vivants et les morts dans le Christ ressuscitĂ©.

 

 

Avec nominis

Vivre au milieu des saints

31/10/2025

Vivre au milieu des saints

Nous vivrons avec des gens qui ont un cƓur de pauvre, pas avec des orgueilleux, des rĂąleurs, des malcontents, des mĂ©prisants
 Quel bonheur de vivre avec des gens qui cherchent Ă  promouvoir l’autre plutĂŽt qu’eux-mĂȘmes ! Nous vivrons avec des doux, avec des misĂ©ricordieux qui ne font pas la liste de leurs griefs envers nous mais nous accueillent avec un grand cƓur. Avec des personnes sensibles qui osent pleurer du mal qui frappe l’homme. Avec des pacifiques. Avec des amoureux de la justice — non pas seulement la justice sociale, mais aussi celle qui concerne Dieu : que Dieu soit honorĂ© comme il convient, et le prochain servi comme il convient ! Nous vivrons avec des gens qui ont tant aimĂ© le Seigneur qu’ils n’ont pas craint les insultes ou la persĂ©cution. Bref, quel paradis partagĂ© avec de tels frĂšres et sƓurs, Ă  contempler l’auteur de toute beautĂ©, de toute joie, de tout amour : nous verrons Dieu tel qu’il est ! (1 Jn 3,2)

 

Vous me direz : et pour tous ceux qui ne sont pas comme le dit JĂ©sus, qu’y aura-t-il pour eux ? C’est pour eux que la mĂ©ditation de l’Église, a partir des indications de l’Écriture qui parlent d’une purification possible aprĂšs la mort, a imaginĂ© qu’il y avait un Purgatoire : un lieu oĂč l’ñme trop tournĂ©e vers elle-mĂȘme apprend Ă  s’ouvrir, Ă  devenir gĂ©nĂ©reuse, Ă  entrer dans le pardon et la louange. C’est pourquoi nous prions pour nos morts, afin de les soutenir dans ce processus de transformation qui introduit Ă  la vie du ciel. Sans doute que ce sont eux aussi, et pas seulement les martyrs, ceux qui « viennent de la grande Ă©preuve » et « ont blanchi leur robe par le sang de l’Agneau » (Ap 7,14)

 

Revenons Ă  la question qui demande : est-ce seulement pour l’avenir ? En rĂ©alitĂ© nous pouvons dĂ©jĂ  commencer le paradis maintenant. Le Royaume des cieux est dĂ©jĂ  prĂ©sent. Regardez-vous : nous sommes entre saints ! Il n’y a pas que les saints canonisĂ©s, ni les saints inconnus que nous fĂȘtons en cette fĂȘte de Toussaint qui mĂ©ritent ce nom de saint. Saint Paul appelait souvent « saints » les chrĂ©tiens auxquels il s’adressait. Vous me direz : avec tous les dĂ©fauts de l’Église, ce n’est pas trop ça
 Mais qui donne la sainteté ? Le saint fait des efforts pour se corriger, pour devenir plus aimant et plus persĂ©vĂ©rant, mais ce ne sont pas ses efforts qui lui donnent la saintetĂ©. Le saint n’est pas celui qui est irrĂ©prochable, mais celui qui se laisse purifier par Dieu. Plus dĂ©terminant que les efforts que nous faisons, ce sont les efforts que Dieu fait qui changent la donne. Ce qui nous rend saints, c’est d’accueillir sa misĂ©ricorde, c’est de se laisser animer par lui. Lui seul est capable de nous rendre purs, de redonner Ă  notre Ăąme sa beautĂ©, son ardeur Ă  aimer. En cette fĂȘte de tous les saints, dĂ©sirons Ă  notre tour ĂȘtre saints : dĂ©sirons que Dieu nous transforme par son amour, et qu’ainsi nous allions de l’avant.

 

Abbé Christophe Cossement

 

NDLR sur l'image : Des hautes montagnes en Galilée ... quand l'I.A. a la foi, tout est possible, je ne l'ai pas brimée !

Personne n'est en sécurité dans la nouvelle Syrie

31/10/2025

Personne n'est en sécurité dans la nouvelle Syrie

La Fondation pontificale Aide Ă  l'Église en DĂ©tresse, qui se consacre Ă  l'assistance aux chrĂ©tiens persĂ©cutĂ©s dans le monde entier, a rĂ©cemment publiĂ© son Rapport 2025 sur la libertĂ© religieuse , Ă©galement relayĂ© par La Nuova Bussola Quotidiana. Pour marquer la parution de ce document, qui analyse le niveau de libertĂ© religieuse dans 196 pays, la section italienne de la Fondation a organisĂ© Ă  Florence, en collaboration avec le diocĂšse local et l'association Agata Smeralda, la rencontre publique « TĂ©moins d'espĂ©rance de la Syrie blessĂ©e ». L'invitĂ© d'honneur Ă©tait Son Excellence Monseigneur Jacques Mourad, moine syriaque catholique et ancien abbĂ© du monastĂšre Saint-Élian, archevĂȘque de Homs Ă  partir de 2023. Monseigneur Mourad a un parcours singulier : nĂ© et Ă©levĂ© Ă  Alep, il est issu d’une famille de syriaques catholiques qui a fui Mardin (aujourd’hui en Turquie) en 1915 en raison des persĂ©cutions des Jeunes-Turcs contre les chrĂ©tiens, notamment les ArmĂ©niens (le tristement cĂ©lĂšbre gĂ©nocide), mais aussi les syriaques catholiques, les ChaldĂ©ens, les orthodoxes grecs et les Assyriens.

 

AprĂšs des Ă©tudes de thĂ©ologie au Liban, il entre dans la communautĂ© monastique de Mar Moussa, fondĂ©e par le pĂšre jĂ©suite italien Paolo Dall’Oglio, enlevĂ© en 2013, vraisemblablement par des militants de l’État islamique. OrdonnĂ© prĂȘtre, Mourad rĂ©pond Ă  la demande de son Ă©vĂȘque de restaurer l’ancien monastĂšre de Mar-Élian, dans la rĂ©gion de Homs, dont il devient l’abbĂ©. En 2015, il est lui-mĂȘme victime d’un enlĂšvement par l’État islamique, mais parvient Ă  s’échapper aprĂšs quatre mois de captivitĂ©.

 

En marge de la réunion publique, Monseigneur Mourad a accordé un long entretien à Nuova Bussola Quotidiana au sujet de la Syrie et de son expérience personnelle en tant que chrétien.

 

Monseigneur Mourad, dans un entretien accordé à l'Agence Fides le 31 janvier, vous aviez évoqué la profonde confusion qui régnait en Syrie aprÚs la prise de pouvoir par l'ancien groupe d'Al-Qaïda, Hayat Tahrir al-Sham. Quelle a été la situation aujourd'hui, prÚs d'un an plus tard ?

Il est difficile de se prononcer, car la situation est complexe et surtout parce que le nouveau gouvernement manque de clarté : ceux qui sont au pouvoir adoptent une stratégie de manipulation, c'est-à-dire qu'ils disent une chose et en font une autre. Les relations avec la population sont marquées par une absence totale de franchise. Pour les nouveaux dirigeants, la population syrienne, composée en grande partie de résistants ayant souffert et été persécutés sous le régime d'Assad, est une population de « flul » (alliés, terme sous-entendu par l'ancien régime) à persécuter.

 

C'est ainsi que le peuple syrien a souffert et souffre encore aujourd'hui


Bien sĂ»r. Le peuple subit innocemment les reprĂ©sailles contre Assad, et le paradoxe est que le nouveau gouvernement utilise, encore plus raffinĂ©, les mĂȘmes mĂ©thodes criminelles dĂ©jĂ  Ă©prouvĂ©es par l'ancien rĂ©gime. De plus, le peuple syrien est appauvri : le nouveau gouvernement a licenciĂ© la plupart des fonctionnaires, les laissant sans salaire. Les rares qui ont pu conserver leur emploi sont payĂ©s en livres syriennes, tandis que les nouveaux arrivants le sont en dollars : 60 dollars par mois pour les premiers, 500 dollars pour les seconds. Le gouvernement a rĂ©cemment dĂ©clarĂ© que la situation allait changer le mois prochain et que tous seraient payĂ©s de la mĂȘme maniĂšre. EspĂ©rons-le.

 

Selon certaines sources, des élections législatives ont eu lieu en Syrie le 5 octobre, mais la majorité de la population n'a pas pu y participer. Avez-vous voté personnellement ?

Non ! Personne n'a voté. Seul un petit groupe d'électeurs sélectionnés par le gouvernement s'est rendu aux urnes pour voter pour les candidats désignés par le gouvernement. Il n'y a pas eu d'élections : une mascarade pour les médias.

 

Vous étiez un ami et un confrÚre du pÚre Dall'Oglio, disparu depuis 2013. Avez-vous des informations sur ce qui a pu lui arriver ?

Aucune nouvelle. À mon avis, l'histoire du pĂšre Dall'Oglio illustre une grave injustice ; elle symbolise toutes les personnes enlevĂ©es depuis des dĂ©cennies en Syrie et la douleur de leurs familles. Le fait est que les enlĂšvements se poursuivent encore aujourd'hui, avec une grande violence. Il faudra beaucoup de temps pour que la situation s'amĂ©liore.

 

Et peut-ĂȘtre aurons-nous aussi besoin de nouveaux dirigeants


Ce qui m'inquiÚte, c'est que ce gouvernement soit acceptable pour la communauté internationale.

 

À votre avis, pourquoi ?

Je crois que Trump souhaite ménager Israël, faire ce qu'Israël veut.

 

Nul n'ignore que Hayat Tahrir al-Sham a pris le pouvoir en Syrie grĂące Ă  l'aval de la Turquie, d'IsraĂ«l et des États-Unis



et aussi de la Russie, qui a convaincu Assad de quitter le pays et de se réfugier à Moscou.

 

Y a-t-il quelqu'un en sécurité en Syrie actuellement ?

Non. Les musulmans sont autant en danger que les chrétiens, sinon plus. Les Druzes sont persécutés, les Alaouites sont persécutés, les Chiites sont persécutés


 

Les Kurdes ?

Non, on ne les a pas persĂ©cutĂ©s, car ce sont des combattants courageux et armĂ©s. N’oublions pas que ce sont les Kurdes qui ont vaincu Daech dans le nord-est de la Syrie.

 

En 2015, vous avez Ă©tĂ© enlevĂ© par des militants de l’État islamique. Avez-vous reconnu certains de vos ravisseurs parmi les nouveaux dirigeants syriens ?

Non, ceux qui sont actuellement au pouvoir sont membres de Hayat Tahrir al-Sham, un groupe issu d'al-Nosra, la branche syrienne d'al-QaĂŻda. L'EI et al-Nosra sont ennemis et s'affrontent.

 

Pourtant, dans le chaos de la nouvelle Syrie, il semble y avoir une place pour l'EI, dont les objectifs ne paraissent pas si Ă©loignĂ©s de ceux du gouvernement de HTS : par exemple, l'Ă©limination des minoritĂ©s religieuses semble ĂȘtre un point commun aux deux groupes.

La diffĂ©rence rĂ©side dans le fait que l'EI poursuit le projet du califat islamique, un royaume oĂč la communautĂ© des croyants en Allah, l' umma islamya,  serait soumise Ă  un seul dirigeant. Al-Nosra, et donc HTS, visent quant Ă  eux Ă  rĂ©pandre la loi islamique dans le monde entier, tout en respectant les diffĂ©rentes nations.

 

Pour revenir Ă  vos quatre mois et vingt jours de captivitĂ©, quelle a Ă©tĂ© la plus grande souffrance que vous ayez endurĂ©e entre les mains de vos ravisseurs ? 

Sans aucun doute, une souffrance psychologique. Les deux premiers jours, j'ai Ă©tĂ© sauvagement battu, mais la souffrance psychologique est plus intense et dangereuse que la souffrance physique. Je dois admettre que Daech a une mĂ©thode Ă©prouvĂ©e et efficace pour exercer une pression psychologique. Au dĂ©but, ils m'ont menacĂ© de dĂ©capitation si je ne me convertissais pas Ă  l'islam – pour eux, convertir un prĂȘtre catholique aurait Ă©tĂ© un grand succĂšs. Quand ils ont compris que cette mĂ©thode ne fonctionnait pas, ils m'ont envoyĂ© un homme trĂšs gentil et respectueux qui m'a racontĂ© l'histoire d'un pasteur anglican converti Ă  l'islam, devenu un enseignant respectĂ© et pĂšre de quatre femmes. Cela n'a pas fonctionnĂ© non plus.

 

Avez-vous déjà été tenté de céder ?

Bien sĂ»r, c'est normal. Non seulement de cĂ©der, mais aussi de se sentir abandonnĂ© de Dieu. Quand je me sentais ainsi, je rĂ©citais le chapelet mentalement, car je n'en avais pas sur moi quand ils m'ont kidnappĂ©. Quand ils m'ont battu violemment pour la premiĂšre fois, j'ai cĂ©dĂ© Ă  la douleur physique et au sentiment d'abandon, et c'est la seule fois oĂč j'ai pleurĂ©. Puis je me suis endormie, j'ai dormi deux heures, et je me suis rĂ©veillĂ©e en chantant la priĂšre de sainte ThĂ©rĂšse d'Avila –  que rien ne te trouble, que rien ne t'effraie  â€“ en arabe, une langue dans laquelle je ne l'avais jamais rĂ©citĂ©e. J'y ai vu un signe que le Seigneur ne m'avait pas abandonnĂ©e, un don gratuit qui m'a donnĂ© la force d'avancer.

 

Que pouvons-nous faire, nous autres Occidentaux, pour la Syrie ?

Prier. Nous devons tous nous unir dans la priÚre : je suis convaincue que la priÚre est la véritable force capable de sauver le monde. Alors que j'étais prisonniÚre et que je priais pour tous, j'ai eu la grùce d'entendre les priÚres de tant de personnes qui imploraient Dieu pour moi. Si j'ai réussi à échapper à mes ravisseurs, c'est grùce à la puissance de la priÚre.

 

Avez-vous peur aujourd'hui ?

Non. J'en suis arrivé à la conclusion que, si je meurs pour la foi, je ne suis ni le premier ni le dernier. De plus, comme le dit saint Paul en parlant de sa propre mort, nous sommes avec Jésus ; que pouvons-nous désirer de plus ? Si la mort est le chemin qui mÚne à Jésus, c'est magnifique.

 

 

Elisa Gestri sur la NBQ